Analyse d'arrêt

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Bonjour,

J'ai réalisé ma première préparation de TD : deux analyses d'arrêt (le premier de cassation, le deuxième de rejet). J'aimerais votre avis sur l'une de mes analyses.

Je vous promets de ne pas le faire chaque semaine, c'est la première et la dernière fois ; j'aimerais être certain que ma première préparation de TD de ma carrière universitaire n'est pas à côté de la plaque.

Voici l'arrêt de cassation que je devais analyser :

"LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Vu l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles 9 et 16 du Code civil ;

Attendu que le magazine Paris-Match a publié dans son numéro 2685 un article intitulé "Routes, la guerre oubliée" où était publiée la photographie d'un jeune homme inanimé, étendu à demi dévêtu sur un brancard, le visage ensanglanté, autour duquel s'affairaient les secouristes du Samu 77, sous-titrée par la légende : "Il faisait la course en scooter. Il avait 16 ans. Les médecins ne pourront le ranimer" ; que les consorts X... estimant que ce cliché, qui représentait Romain X... décédé le 13 juin 2000 à l'âge de 17 ans des suites d'un accident de la circulation alors qu'il pilotait un scooter, portait atteinte à la dignité de la personne représentée, ont attrait en justice la société Hachette Filipacchi associés ;

Attendu que pour condamner la société Hachette Filipacchi associés à payer des dommages-intérêts aux consorts X..., la cour d'appel a notamment énoncé que le droit à la liberté d'informer s'exerçait dans le respect des droits de l'individu et que la nécessité d'une illustration pertinente ne pouvait être valablement invoquée dans un tel contexte où l'article ne relatait pas un fait d'actualité mais était consacré à un phénomène de société et que la photographie publiée sans précaution d'anonymat de l'intéressé, qui représentait le fils et frère des intimés, le visage maculé de sang, inanimé, sur un brancard, portait atteinte à la dignité de la victime et nécessairement à l'intimité de la vie privée de sa famille ;

Qu'en statuant ainsi alors que le principe de la liberté de la presse implique le libre choix des illustrations d'un débat général de phénomène de société sous la seule réserve du respect de la dignité de la personne humaine, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si l'information des lecteurs justifiait la publication de la photographie litigieuse, ni caractérisé l'atteinte portée par celle-ci à la dignité de la victime, n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 avril 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne les consorts X... aux dépens ;"


Ci-dessous mon analyse :

"Organisation juridictionnelle - Travaux dirigés

Analyse de l'arrêt de cassation du 4 novembre 2004

Le magazine Paris-Match a publié une photographie de Romain X - décédé à 17 ans des suites d'un accident de la circulation alors qu'il conduisait un scooter - le représentant le visage ensanglanté et étendu à demi dévêtu sur un brancard. Les père et frère de Romain X considèrent qu'il s'agit d'une atteinte à la dignité de la victime et d'une atteinte à l'intimité de la vie de leur famille.

Les consorts X décident alors d'assigner, en qualité de demandeur, la société Hachette Filipacchi associés , éditrice du magazine Paris-Match. Ces derniers ont donc la qualité de défendeur. Le fondement de leur action et leurs prétentions ne sont pas communiqués.

La juridiction saisie est le tribunal de grande instance dont la localité n'est pas indiquée ; ni les motifs, ni le dispositif de la décision ne sont communiqués.

Suite à la décision de la juridiction de premier degré, la société Hachette Filipacchi associés interjette appel du jugement rendu, en qualité d'appelant ; les père et frère de Romain X prennent la qualité d'intimé. Les prétentions des parties demeurent vraisemblablement les mêmes. La Cour d'appel de Versailles qui a été saisie rend un arrêt le 3 avril 2003 dans lequel elle rejette la demande de la société Hachette Filipacchi associés et la condamne à payer des dommages-intérêts aux consorts X.

Ses motifs sont les suivants :

- Premièrement, elle rappelle que le droit à la liberté d'informer doit s'exercer dans le respect des droits de l'individu.
- Deuxièmement, elle constate que l'article ne relatait pas un fait d'actualité ; la nécessité d'une illustration pertinente ne s'imposait donc pas.
- Troisièmement, et enfin, la photographie a été publiée sans précaution de l'anonymat de l'intéressé, qui était par ailleurs dans une situation (inanimé, à demi dévêtu et le visage ensanglanté) qui portait atteinte et à la dignité de la victime, et à l'intimité de la vie privée de la famille des consorts X.

Un pourvoi en cassation constitué d'un moyen unique est formé par la société Hachette Filipacchi associés en qualité de demandeur. Les père et frère de Romain X ont la qualité de défendeur. Le contenu du pourvoi n'est pas communiqué.

Saisie de cette affaire, la 2ème chambre civile de la Cour de cassation a dû répondre à la question suivante : illustrer un article consacré à un phénomène de société avec la photographie d'une victime inanimée et ensanglantée constitue-t-il une atteinte à sa dignité et à l'intimité de la vie privée de sa famille pouvant justifier une restriction à la liberté d'expression de la presse ?

Pour y répondre, la 2ème chambre civile rend un arrêt au visa de l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des articles 9 et 16 du Code Civil.

Elle retient trois motifs différents :

- Premièrement, elle rappelle que le principe de liberté de la presse permet à cette dernière de choisir librement les illustrations d'un débat consacré aux phénomènes généraux de société, sous la seule réserve du respect de la dignité de la personne humaine.
- Deuxièmement, elle constate que la Cour d'appel n'a pas recherché si l'information des lecteurs justifiait la publication de la photographie litigieuse.
- Troisièmement, et enfin, elle constate également que la Cour d'appel n'a pas caractérisé l'atteinte portée par la photographie litigieuse à la dignité de la victime.

Pour ces différents motifs, la 2ème chambre civile peut conclure que les motifs du moyen unique manquent de base légale. Elle rend donc un arrêt de cassation le 4 novembre 2004, condamne les consorts X aux dépens et renvoie les parties devant la Cour d'appel de Paris.
"

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Que dois tu faire ? Qu'as tu trouvé pour le moment ?

Cordialement.

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"Paradoxalement c’est au nombre de ses interdits et non pas de ses permissions que l’on reconnaît une société pervertie. Ainsi une société qui interdit la prostitution avoue son penchant pour la prostitution. Une société qui interdit la drogue avoue son penchant pour la drogue. Une société qui interdit le meurtre avoue son penchant pour le sang.".

http://http://www.juristudiant.com/forum/charte-de-bonne-conduite-a-lire-avant-de-poster-t11.html

Etudiant à l'Université Toulouse I Capitole.

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Pour mon premier TD (ce sera la première séance),j'avais juste à faire une analyse d'arrêt.

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oh ça me rappelle ma 1ere fiche d'arret!!!

Bon, en vrac, je te dirais
1) qualifie "juridiquement" les parties, plus de mr x, parle de la victime( (le père et le frère du )le mineur décédé, le magazine et la société éditrice assignés...

2.le fondement, c'est la base légale sur laquelle on s'appuie. L'atteinte a la dignité de la personne humaine ici, il me semble. regarde ton code.

3.Si on ne parle du TGI, n'écris rien; même pas "Le tribunal saisi en 1ere instance et son dispositif sont inconnus" par ex. Rien. De meme pour tout ce qui n"est pas communiqué.

Sinon quelques redondances normales pour une 1ere fois mais rien de grave (un appelant a forcément interjeté appel... etc)

D'autres auraient peut être des choses à dire( et me corriger si ça se trouve), j'ai lu en biais ton analyse.
Mais c'est pas trop mal, faut s'entrainer pas de mystère

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Yn Membre VIP

Pour un premier travail de L1, je trouve ça plutôt pas mal. Quelques remarques :

Le magazine Paris-Match a publié une photographie de Romain X - décédé à 17 ans des suites d'un accident de la circulation alors qu'il conduisait un scooter - le représentant le visage ensanglanté et étendu à demi dévêtu sur un brancard. Les père et frère de Romain X considèrent qu'il s'agit d'une atteinte à la dignité de la victime et d'une atteinte à l'intimité de la vie de leur famille.
Inutile de détailler les faits à outrance : pour illustrer un reportage, Paris-Match a publié la photographie du cadavre d'un adolescent suite à son accident de scooter. Les père et frère...

Saisie de cette affaire, la 2ème chambre civile de la Cour de cassation a dû répondre à la question suivante : illustrer un article consacré à un phénomène de société avec la photographie d'une victime inanimée et ensanglantée constitue-t-il une atteinte à sa dignité et à l'intimité de la vie privée de sa famille pouvant justifier une restriction à la liberté d'expression de la presse ?

Pour y répondre, la 2ème chambre civile rend un arrêt au visa de l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des articles 9 et 16 du Code Civil.

Ces deux paragraphes peuvent être améliorés.

1°/ Ton problème de droit est trop long. Il faut trouver un équilibre entre la généralité de la question - que l'on pourrait appliquer à d'autres situations - et sa précision.

Préciser que la victime était ensanglantée, inanimée, ne sert à rien. Contente-toi de préciser qu'elle est décédée. Il faut appuyer sur l'opposition liberté de la presse / respect de la dignité.

Par exemple : "La publication de la photographie d'un cadavre peut-elle entraîner une restriction de la liberté de la presse au nom du respect de la dignité de la personne humaine ?"

Cherche toujours un équilibre entre la simplicité et l'exactitude des termes employés.

2°/ Préfère les formules courtes : "Par un arrêt de cassation, la deuxième Chambre civile affirme que " et annonce de plan.

Tu vas commenter l'arrêt, c'est-à-dire expliquer sa logique, son sens, sa portée, et les mots employés ont un sens. Il est donc inutile de paraphraser au risque de travestir les propos.

Je rejoins le précédent avis sur les précisions inutiles lors de la procédure (non communication de la décision, etc.) : il suffit de reprendre les éléments de la procédure indispensable pour comprendre pourquoi la Cour de cassation a été saisie.

Une fiche d'arrêt doit comprendre tous les éléments nécessaire à la compréhension de l'affaire mais seulement ces éléments. Elle peut être très courte et tenir sur une seule page.


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« Je persiste et je signe ! »

Docteur en droit, Université Paris-1 Panthéon-Sorbonne.

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Bonjour,

Merci pour ta réponse Saya ! Je suis d'accord avec tout ce que tu as relevé. Cependant, concernant le point 3, sache que c'est mon professeur qui nous a demandé de préciser même les données qui n'apparaissent pas dans l'arrêt, pour bien montrer qu'on a noté leur absence justement. Cela explique donc toutes ces redondances.

Merci en tout cas.

Remerciements également à toi YN, pour ta réponse détaillée.

Effectivement le chargé de TD a rappelé que le rappel des faits devait être relativement bref, je vais tâcher de corriger cela pour mes prochaines analyses.

Concernant la question de droit, j'avais précisé "inanimée et ensanglantée" parce qu'on parlait d'atteinte à la dignité, j'estimais que ces adjectifs caractérisaient bien l'atteinte ici mais c'était oublier que la Cour de cassation ne juge l'affaire qu'en droit, pas en fait. Le professeur a suggéré ces questions de droit : "Peut-on considérer que l'enfant à naître soit une personne juridique au sens de l'article 221-6 ?", "L'incrimination prévue par l'article 221-6 peut elle être appliquée au cas de l'enfant à naître ?" En gros il suggère de faire porter la question sur la personnalité juridique (ou plutôt l'absence de personnalité juridique) du foetus, qui est justement un cas particulier, étant donné que seul l'enfant vivant et viable est considéré comme une "personne".

Je vous remercie en tout cas !

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Yn Membre VIP

Ces questions de droit ne sont pas relatives à l'arrêt. Elles portent sur un sujet bien différent : le début de la personnalité juridique.

De plus, il s'agit des articles du Code pénal, pas du Code civil pour un arrêt bien connu qui n'a aucun rapport avec la dignité de la personne humaine.

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« Je persiste et je signe ! »

Docteur en droit, Université Paris-1 Panthéon-Sorbonne.

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Ah non excusez moi, je me suis trompé d'arrêt, j'ai cru que j'avais posté l'analyse de l'arrêt de rejet du 29 juin 2001. Vraiment désolé !

La question de droit suggérée par le chargé de TD pour cet arrêt est la suivante :

"La publication de la photo d'un cadavre peut-elle conduire à restreindre la liberté de la presse ?"

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Arrêt de rejet rendu le 17 décembre 2008 par la 1ère chambre civile de la Cour de cassation.

Attendu que Mme Alice X... épouse Y... a présenté, sur le fondement de l'article 99 du code civil, une requête en rectification de ses actes de naissance et de mariage, de ceux de son père, de son grand-père et de son arrière grand-père ainsi que des actes de naissance de ses enfants et de son conjoint ; qu'elle soutenait que le nom de ses ancêtres depuis le milieu du 16e siècle était " Charles de Z... " et qu'à la suite d'une première erreur involontaire de l'officier de l'état civil, son ancêtre Marie Louis A... avait été nommé " Charles X... " dans son acte de mariage en 1820 puis, qu'à la suite d'une seconde erreur, l'acte de mariage de son ancêtre Pierre Alexandre B... dressé en 1877, et tous les actes postérieurs, ont fait uniquement mention du nom " X... " ; que le tribunal de grande instance puis la cour d'appel l'ont déboutée de sa demande tendant à ce qu'il soit substitué à son patronyme celui de " Charles de Z... " ;

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 2 novembre 2006) de la débouter de sa requête en rectification d'état civil, alors, selon le moyen, que la renonciation à un droit ne se présume pas et si elle n'est pas expresse, elle doit résulter d'acte manifestant la volonté non équivoque de renoncer ; que, partant, le silence ou le défaut de protestation ne peut valoir renonciation ; qu'en relevant, pour débouter Mme X... de sa requête, que ses ascendants avaient renoncé à utiliser le nom Charles de Z..., sans caractériser d'actes non équivoques manifestant leur volonté de renoncer au port de ce nom tandis que leur défaut de protestation à la suite des erreurs commises par les officiers d'état civil ne pouvait suffire à caractériser cette volonté, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 99 du code civil, ensemble la loi du 6 fructidor an II et les principes qui régissent le droit au nom ;

Mais attendu que la cour d'appel a justement rappelé que la possession loyale et prolongée d'un nom est propre à conférer à l'individu qui le porte le droit à ce nom
et que si elle ne fait pas obstacle à ce que celui-ci, renonçant à s'en prévaloir, revendique le nom de ses ancêtres,
il appartient au juge, en considération notamment de la durée respective et de l'ancienneté des possessions invoquées, ainsi que des circonstances dans lesquelles elles se sont succédé, d'apprécier s'il y a lieu d'accueillir cette revendication,
que, par motifs propres et adoptés, l'arrêt relève que l'usage du nom patronymique revendiqué n'est établi que pour une durée de 68 ans, en l'absence de toute pièce antérieure à 1752, que depuis plus de 150 ans, les ascendants de la requérante ont porté le patronyme X... sans jamais revendiquer le retour au patronyme originel,
que le jugement en rectification d'état civil du 7 mars 1903 n'a concerné que l'autre branche de la famille et non l'aïeul de la requérante, qui, depuis son mariage en 1877, a été uniquement désigné sous le nom " X... ", patronyme qui dès lors a continué à être constamment et volontairement porté dans sa famille et utilisé dans tous les actes d'état civil postérieurs jusqu'à nos jours ;
que les juges du fond ont pu en déduire que les ascendants de la requérante avaient renoncé à utiliser le nom de Charles de Z... et ont souverainement estimé qu'eu égard aux circonstances, et notamment à la durée des possessions, il n'y avait pas lieu de faire droit à la demande de rectification ; d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;


J'aimerais savoir, s'il vous plaît, ce que vous pensez de la question de droit suivante, pour l'arrêt rapporté ci-dessus : "le défaut de revendication d'un nom sur une longue période, cumulé à l'utilisation prolongée d'un nom acquis de manière légale, justifient t-ils que le droit à la possession du nom originel soit effacé de l'actif du patrimoine du sujet de droit ?

Encore merci, par avance.

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Yn Membre VIP

La question de droit suggérée par le chargé de TD pour cet arrêt est la suivante :

"La publication de la photo d'un cadavre peut-elle conduire à restreindre la liberté de la presse ?"

Je trouve la question trop courte car elle ne relate pas l'opposition liberté de la presse/respect de la dignité humaine (cf. mon message précédent pour la question, selon moi, appropriée).

De même, pour le second arrêt, la question est soit trop longue (Meehdi), soit trop courte (Lexa). Il ne faut pas occulter les critères posés par la Cour de cassation pour se prévaloir d'un nom.

La question de droit doit se déduire du pourvoi et coller à la solution de la Cour. Si vous réussissez à faire un mélange des deux, votre problème de droit sera toujours approprié.

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« Je persiste et je signe ! »

Docteur en droit, Université Paris-1 Panthéon-Sorbonne.

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Merci pour ta réponse, je vais retravailler dessus.