Familles : Quel avenir pour le devoir de fidélité ?

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Notion sujette à interprétation. La fidélité présente une double réalité, une réalité humaine d’abord intéressant à ce titre le psychologue et le sociologue. Une réalité juridique enfin, interessant le praticien, le législateur et enfin le juge, dés lors que la fidélité atteinte donnera naissance à un litige.

« La fidélité est contraire à la nature humaine [/i]», disait le philosophe Charles Fourier[/b].

Quiconque ouvrira un Code Civil, observera que le législateur, à consacré cette obligation réciproque des époux à l’article 212 du Code Civil[/b], et par la formule suivante : “ Les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours, assistance.[/b]”. Contraire à la nature humaine ou non, elle n’en demeure pas moins en conséquence l’un des devoirs incombant aux époux au titre du Mariage.

Le psychologue Jean Garneau[/b] énonçait ainsi en 2006 (La lettre du psy, Volume 9, No 6: Juin 2005[/i]) que “pour un grand nombre de couples, la fidélité représente une garantie de la qualité de leur relation amoureuse. Tant que les partenaires restent fidèles l’un à l’autre, ils considèrent que le couple est solide et que les différents entre eux ne sont que des contretemps normaux[/i].”.

Quid du juriste ? Gérard Cornu[/b] (Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, 10e éd., PUF, 2014[/i]) définissait la fidélité comme « le devoir pour chaque époux de ne pas commettre l'adultère et ne pas entretenir avec un tiers des relations offensantes pour son époux[/b] ».

Le juriste, au travers de la fidélité, mettra en exergue un instrument de “protection du couple et de la famille” davantage qu’une “garantie de permanence de l’amour” et c’est là toute la différence entre la réalité juridique et la réalité sociale de la fidélité. La réalité juridique se caractérise par une abstraction, l’abstraction de l’amour, car il serait loisible d’affirmer que l’amour est étranger au droit. L’amour est un sentiment inconnu du droit qui lui préfère le consentement. Lorsqu’une réalité repose sur l’amour ou la croyance en l’amour, l’autre repose fondamentalement sur le consentement base de tout engagement, l’engagement étant ici de satisfaire aux obligations souscrites.

La fidélité encore et toujours, soulève pour le juriste averti, d’autres questionnements. Étant symbole d’un mariage au caractère monogamique, elle influence la filiation (rappelons que dans un couple marié, la filiation paternelle s'établit automatiquement car le mari est présumé être le père de l’enfant.) mais elle intéresse également les règles de dévolution successorales, en témoigne l’admission d’une action en révocation d’une donation au motif de relations extra-conjugales dans un arrêt récent de la première chambre civile de la Cour de cassation, en date du 25 octobre 2017 venant démontrer si besoin il en était, que le devoir de fidélité à encore de beaux jours devant lui.

L’infidélité cependant à elle aussi ses victoires. Grégoire Loiseau[/b], Agrégé et Professeur à l’Université Paris I – Panthéon Sorbonne (Le courtage adultère : l'infidélité dans le marché (Recueil Dalloz 2015 p.1433)[/b] affirmait en 2015 que “Sorti de l'ombre où il se tient ordinairement tapi, l'adultère est publiquement promu comme une transgression à la portée de toute personne mariée[/i]”.

Il est en effet loisible d’affirmer que les nouvelles technologies sont aujourd’hui un facteur de dématérialisation de l’infidélité. Ainsi que l’exprimait en 2016 Delphine Chauvet[/b], Docteur en droit (AJ Famille 2016 p.148[/b]), “Les réseaux sociaux, les sites de rencontres, le téléphone rose, les SMS et les mails sont les outils privilégiés par Casanova pour flirter sans pour autant que cela devienne physique[/i].”.

Ces affirmations appréhendées à l’aune de nos moeurs contemporaine, à l’ère du numérique et de l’interconnexion des individus, nous invitent à une réflexion sur l’un des devoirs les plus emblématique du mariage, le devoir de fidélité, avec cette question : Existe-il aujourd’hui un déclin du devoir de fidélité ?

N’étant plus une cause péremptoire de divorce, l’infidélité ne constitue une cause de divorce pour faute que s’il est établi qu’elle constitue ainsi au sens de l’article 242 du Code Civil[/b], “une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune[/i]”. L’absence de responsabilité du tiers en qualité d’amant ou de maitresse est également à préciser (voir Civ. 2e, 5 juill. 2001, n° 99-21.445[/b]).

En conclusion, loin d’être exhaustif sur l’ensemble des problématiques et enjeux de la notion, il s’agit avant toute chose ici de contextualiser une notion plus que de la présenter, tant celle-ci est assurément connue de tous. Nous dirigeons nous vers une fidélité davantage contractuelle que légale, soumise à l’intensité choisie de ses propres assujettis ayant pour conséquence la déjudiciarisation de cette obligation fondamentale inhérente à la nature même du mariage ?
Bienheureux sont les audacieux qui se risqueront à quelques prédictions.

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Étudiant en Maitrise de Droit Privé, mention Droit Privé et Judiciaire à l'Université Jean Moulin Lyon 3

Retrouvez mon blog juridique personnel : http://jordanminarv.wordpress.com

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Je vous prie d'accueillir mon premier article ci-dessu comme première contribution, et ouverture au débat. :)

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Bonjour Jordan, je vous remercie pour cet article très complet, vous avez une très belle plume!

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Bonjour Marine, merci beaucoup.
C'est très gentil à vous.

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Isidore Beautrelet Administrateur

Bonjour

Article très intéressant !

Je me suis juste permis d'enlever le mot "Article" dans votre titre pour plus de lisibilité.
Je vais demander à Kern s'il ne peut pas nous créer une balise "Article"

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Merci Isidore :)
Aucun soucis c'est une bonne idée.

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MorganM Intervenant

Je partage votre analyse, notamment s’agissant de la conception sociale et juridique de la fidélité.

D’ailleurs, il n’est pas inopportun de s’interroger sur l’article 212 du code civil que vous citez. Abstraction faite de la réalité sociale de la fidélité, cette disposition ne vise-t-elle pas surtout à protéger le principe de l’institution du mariage ? Cette dernière serait vidée d’une partie de son sens si la fidélité n’était pas sanctionnée. C’est aussi une manière de distinguer les personnes mariées de celles qui ne le sont pas.

Même si, in fine, la protection du mariage a nécessairement des origines sociales.

Il est clair que les nouvelles technologies ont un impact sur l’augmentation de l’infidélité. Avant, les couples se formaient principalement entre des personnes vivant à proximité, sans possibilité de trouver quelqu’un d’autre ailleurs. La suppression virtuelle des distances a permis d’étendre les recherches et d’augmenter les risques de rencontre et donc, d’infidélité.