Le mariage pour tous : la question du référendum

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Par ce dimanche pluvieux, je décidai de regarder la télévision (BFM – manifestation mariage pour tous – édition spéciale oblige) tout en lisant quelques hebdomadaires en retard des échos.

Un remarquable programme culturel du reste.

Bien que ma religion fut faite sur le sujet, la contradiction, constructive et de bonne foi bien sûr, avait l’heur de me combler.

Je pris le premier quotidien les échos qui me tomba sous les mains et je lis un article aux termes duquel plusieurs hommes politiques de l’opposition présidentielle appelèrent à un référendum sur ce litigieux projet de loi).

Quelques instants après, j’entendis marteler, le même argument, à plusieurs reprises, par hommes et femmes politiques et journalistes sur BFM.

Il était temps d’aller me faire un café devant autant d’ignorance qu’un étudiant de première année de droit éviterait sans encombre. Dans le doute, je ne m’abstiens pas, et je me propose de rappeler certaines règles fondamentales de droit constitutionnel de première année de droit.

L’article 11 de la constitution de la cinquième république dispose que : « le Président de la république…peut soumettre au referendum tout projet de loi portant sur l’organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politiques économiques, sociale ou environnementale de la nation et au services publics qui y concourent, ou tendant à la ratification d’un traité qui aurait des incidences sur le fonctionnement des institutions ».

On ne peut être plus clair. Le mariage pour tous ne relève d’aucune de ces questions et, sauf à réviser la constitution, le projet de loi ne peut être adopté que par le parlement à l’exclusion d’une loi référendaire.

Est-ce à dire que les hommes politiques sont aussi bêtes à manger du foin ? Bien sûr que non. Pour eux, l’argument est, tout au moins, démagogique tout au plus, ils savent que si la constitution devait être révisée (la majorité requise des 3/5 ne serait pas acquise au congrès).

En ce qui concerne les journalistes, je suis un peu plus sceptique quant à leurs connaissances juridiques et j’encourage les étudiants à faire preuve, quel que soit la qualité du journal, à faire preuve d‘esprit critique au cours de leurs lectures.

Voici une modeste analyse juridique, il ne convient d’y voir aucune opinion sociétale.

Michel BLAISE (Avocat)

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Bonsoir,

Tout d'abord, merci beaucoup pour cet article très intéressant et très pertinent !

Je partage donc la quasi-totalité de votre analyse, mais deux questions subsistent après relecture.

Tout d'abord, je me demandais ce que vous pensiez de la question constitutionnelle ? A votre avis, la constitution doit-elle être révisée pour que le législateur puisse accorder le mariage aux homosexuels ? A mon humble avis, je dirais non, mais je ne me prétends nullement aussi bon juriste que vous, donc je préfère demander.

Enfin, je me demandais, lorsque vous dite que le texte est "on ne peut plus clair" et que le mariage pour tous "ne relève d'aucune de ces questions", si on ne pouvait pas entendre "politique sociale" dans le sens de l'institution du mariage ? Je ne sais pas vraiment ce qui a été considéré en pratique ou en jurisprudence comme politique sociale, mais j'ai tout de même l'impression au premier abord, qu'on pourrait rattacher ces deux notions. Est-ce que je me trompe ?
J'espère que oui pour tout vous dire. Cela renforcerait mon point de vue qui est aussi le votre, au sujet de la profonde démagogie que l'on nous sert chaque jour pour mieux nous manipuler !

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Bonsoir,

La politique sociale ne signifie pas une question de société et peu importe, à cet égard, que le mariage soit une institution. Par politique sociale, il faut comprendre, pardon pour le racourci, sécurité sociale, emploi, négociation collective... donc le référendum ne peut mofifier le droit de la famille. Cela ne souffre d'aucune contestation, il s'agit d'une question de terminologie juridique.

Bien à vous.

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Michel blaise avocat

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Il faudrait réviser la constitution. Vous n imaginez pas le Président Hollande prendre ce risque, il n obtiendra pas les 3/5 au congrès , le projet tomberait politiquement aux oubliettes et M Hollande subirait un revers politique. Il n en à pas besoin.

Michel Blaise

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Bien entendu, le président, pour contourner, les difficultés du congrès, peut soumettre à référendum la révision de la constitution ( loi référendaire non soumise à censure du Conseil const.) Puis, soumettre, une fois la constitution révisée, le projet de loi " mariage pour tous" à référendum ( c est le référendum sur le référendum). Mais, ici aussi , le Président Hollande ne se risquera pas à soumettre ce dernier projet, après réforme constitutionnelle, à la décision populaire ( risque de rejet). Je prends le pari, mais là je fais de la politique fiction, que le projet la loi n ira pas à son terme et sans être enterré sera renvoyé sine die sous un prétexte divers...

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Michel blaise avocat

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Bonjour à tous,

Je partage également cette analyse. Le mariage pour tous semble, en effet, n'entrer dans aucun des cas énumérés par l'article 11 de la Constitution (que l'on soit pour ou contre cette réforme, c'est indéniable).

J'étais assez heureuse ce matin en voyant que certaines chaines d'information avaient relayé cet argument. Mais c'était sans compter ce qui a suivi: l'interview de certains politiques (que je ne citerai pas) qui ont pu dire:
" le peuple est souverain donc tous les sujets devraient être soumis au référendum"
ou encore: "le mariage pour tous entre dans le cadre de l'article 11"... sans même argumenter... ce que je trouve assez déplorable.

Ou encore un journaliste renommé que j'ai entendu dire que le mariage pour tous pourrait entrer dans le domaine de l'organisation des pouvoirs publics... 31.gif.
Pour rappel, il y a eu auparavant des référendums sur l'organisations des pouvoirs publics:
- l'autodétermination des populations algériennes et l'organisation des pouvoirs publics en Algérie avant l'autodétermination, le 8 janvier 1961;

- l'approbation des accords d'Evian et les mesures à prendre au sujet de l'Algérie, le 8 avril 1962;

- l'élection du Président de la République au suffrage universel direct, le 28 octobre 1962;

- la création des régions et la rénovation du Sénat, le 27 avril 1969;

- les dispositions statutaires et préparatoires à l'autodétermination de la Nouvelle-Calédonie en 1988, le 6 novembre 1988;

- ...
Vraiment rien à voir avec notre sujet donc...

En outre, comme l'a justement dit Maître Blaise, la politique sociale ne recouvre pas non plus cette hypothèse.

Enfin, en plus du fait que le mariage pour tous ne semble pas entrer dans les domaines de l'article 11, il faut tout de même relever autre chose:
" Le Président de la République, sur proposition du Gouvernement pendant la durée des sessions ou sur proposition conjointe des deux assemblées, publiées au Journal officiel, peut soumettre au référendum tout projet de loi portant sur l'organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation et aux services publics qui y concourent, ou tendant à autoriser la ratification d'un traité qui, sans être contraire à la Constitution, aurait des incidences sur le fonctionnement des institutions..."

Cet article évoque une possibilité de soumettre au référendum tel ou tel sujet et non pas une obligation, il ne faudrait pas tout confondre.

Merci pour ces interventions objectives en tous cas 4.gif

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Bonsoir

Je trouve votre contribution intelligente, objective, rigoureuse frappée du coin du bon sens. On n'est pas nécessairement d accord avec la loi RÉPUBLICAINE, mais s y soumettre participe du bon maintien de l ordre public et l'intérêt général ne représente pas la somme des intérêts particuliers. Je voudrais donner objectivité à mes interventions, je suis homosuel, mais d avis défavorable à cette loi. Cependant, même si je manifeste démocratiquement mon opinion, je me soumettrai à la legalite repulicaine.

PS : ma volonté respectueuse des institutions ne me conduiront pas à me marier ( il ne fait pas pousser) avec un homme ( ni avec une femme) , ceci reste dans le cercle de ma vie privée.

Michel Blaise

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le plus insolite dans tout ça, comme le souligne guy Carcassonne c'est qu'il s'agit de l'UMP qui demande majoritairement que la question soit tranchée par référendum, alors que c'est eux même, qui à l'époque majoritaires au parlement qui ont refusé l'élargissement des domaines applicables aux référendum.

Il semblerais donc que les politiciens ont la mémoire courte étant donné qu'ils demandent l'application de quelque chose qu'ils n'ont eux même pas voulu

Ni voyez ici aucune position politique juste une constatation objective.

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J aurais aimé Matthieu un débat digne d un juriste, le rôle d un opposant est différent et c est tant mieux pour la démocratie. C est pourquoi, en tant que juriste et non de politicien, je ne n' aborderai pas le débat qui consistait, pour la gauche, alors dans l' opposition, à demander la démission du ministre du budget ( Éric woerth) a grand coup de lynchage et aujourd'hui la majorité de gauche à soutenir - je note au passage avec la contribution de JF COPPE- le ministre du budget lui aussi mis en cause. L un et l autre sont accusés et non condamnés. Conclusions, faites du droit, soyez rigoureux et laissez aux chiens les discussions de café de commerce.

Sur une copie cette argumentation vaut un zéro éliminatoire


Bien à vous.

Michel BLAISE

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J ajoute que la médiatisation du Professeur Carcassonne est inversement proportionnelle à l' objectivité et à la rigueur de ses interventions. J ai connu ça également du Professeur Roussillon (Toulouse I) qui s'écoutait parler à l'époque sur télé Toulouse ( pitoyable) de droit constitutionnel, qui aveuglé par la lumière, en oubliait ce pourquoi il s exprimait : le droit, à l exclusion des opinions sujettes à cabotinages. Je rassure les étudiants de l' excellent Professeur Carcassonne, la chaire le ramène à de plus justes attitudes. Une grande amertume cependant, le souvenir de l' excellent constitutionnaliste : le professeur Maurice Duverger, incontestablement le maître de tous, que je n' ai connu qu'à travers ses nombreux ouvrages et les cours du Professeur Crouzatier(Toulouse I). Si quelqu'un a des nouvelles du Professeur Crouzatier, je serai ravi de les connaître. Merci.

Michel Blaise (Avocat)

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Conclusions, faites du droit, soyez rigoureux et laissez aux chiens les discussions de café de commerce.

Sur une copie cette argumentation vaut un zéro éliminatoire


Sur une copie, des fautes grossières valent un zéro éliminatoire aussi ?

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"La vie m'a appris qu'il y a deux choses dont on peut très bien se passer : la présidence de la République et la prostate."

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Bonsoir Cosinus,

Considérer que les discussions de café du commerce sont l'apanage des "chiens" vous permet-il de parler à Matthieu comme à un chien ?

J'exige bien entendu une réponse digne d'un juriste ;)

Bien à vous.

Johjohn

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Merci "johnjohn54" ! Merci de dire et de confirmer ce que je répète des mois et des mois sur ce forum, à savoir que certains intervenants, sous prétexte de je ne sais quoi, se permettent de parler n'importe comment aux plus jeunes...

Me voilà moins esseulé dans mon sentiment...

J'ajoute pour cet intervenant, "cosinus" de je ne sais quoi, que nous sommes sur un forum, pas à la fac ou à un partiel, par conséquent on s'en contre-fiche des "sur une copie cette argumentation vaut un zéro éliminatoire", qui sont au demeurant d'un mépris assez gerbant...

Nul n'est l'élève ni le prof de personne ici, tout le monde est sur un même pied d'égalité, et le titre d'avocat n'autorise personne à s'adresser à un membre du forum comme à un chien...C'est révoltant, minable, pitoyable et inadmissible...Et je préfère m'arrêter là.

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J ai dit de laisser aux chiens les discussions de café de commerce , c' est. vous seul, et certainement pas moi, qui traiterait l'honorable rédacteur de tchien. Je regrette que vous contribuiez à créer une confusion sur cet honorable étudiant qui n' est venu qu a l esprit de polémiste peut être en mal de sentiment d infériorité, lisez votre phrase comparative entre vieux et jeunes. Et comme disait Brassens : le temps ne fait rien a l affaire qu on ait 20 ans ou 40 ans, quand yon es con on est con" fin de citation.
Je parlais surtout du professeur Carcassonne pas aussi brillant qu'il ne le laisse paraître ( cf infra des constitutionnalistes de renom qui ne s agitent pas sur radio et télé

Bien à vous

Michel Blaise. (Avocat)

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Bonsoir à tous,

Merci de ne pas polémiquer sur telle chose, qui est interprétée de telle façon par les uns ou les autres et de vous re-concentrer sur le sujet principal sur lequel je vous encourage à donner un avis sinon je me verrais dans l'obligation de clôturer ce sujet pourtant très intéressant.

Dan33, c'est marrant mais quasiment à chaque fois que vous postez c'est pour intervenir sur ce qui a été (ou pas) dit de travers. Il serait sans doute plus productif de donner votre avis sur des sujets de débat comme celui-ci ou de répondre aux étudiants qui demandent une aide, votre temps serait mieux employé et c'est quand même le but principal du forum.

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Bulle, c'est marrant comme vous ne semblez voir que ce que vous voulez voir, je suis intervenu avant-hier sur un fil de discussion relatif à une réorientation classe prépa/fac. Il serait sans doute plus productif de réfléchir avant d'agir et de m'invectiver à tort. Fin du débat.

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C'est sans doute parce que j'ai pu lire plus de messages de critiques que d'aide...
Mais c'est bien si vous êtes intervenu dans un fil récent pour répondre à un étudiant, je vous encourage dans cette voie.

Bonne soirée à vous

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Bonjour à tous,

Pour reprendre le fil du sujet. Je suis pour le moins sceptique avec les arguments présentés.

Est-ce par rapport au sujet que l'on doit considérer le référendum ou par rapport à l'outil en lui-même?

Associer la question d'un référendum social n'a rien dénué de sens à mon avis. N'est-on pas dans un régime politique appelé démocratie? Autrement dit étymologiquement : le pouvoir du peuple?

Il me semble que l'Article 2 de la COnstitution française de 1958 consacre comme principe de la France : "La gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple."


Ainsi en quoi paraît-il si choquant d'élargir l'outil le plus représentatif du pouvoir du peuple aux questions sociales?


Je suis plutôt surprise personnellement que l'étonnement soit contraire.


Historiquement, les politiciens français ont peut de cet outil de démocratie semi-indirecte appelée le référendum tout simplement pour une question de crédibilité.

On l'a d'ailleurs très bien vu en 1969 avec le général De Gaulle, grand adorateur de l'utilisation du référendum en tant que plébiscite qui, suite au non répondu en masse par les citoyens à son référendum sur une réforme du Sénat et des régions il me semble, a dû démissionner comme il avait promit de le faire dans un épique discours théâtrale si d'aventure une telle situation devait se présenter.

De même pour Mr Chirac qui dû s'opposer à un refus massif de sa proposition de traité simplifié pour l'Union Européenne.


Ainsi au final cette peur contagieuse du référendum est tout simplement dû à la peur des politiciens d'être décrédibilisés sur des questions d'ordre sociétal. Sinon pourquoi Mr Sakozy dans sa révision constitutionnelle de l'article 11 de février 2008, créant la possibilité d'un référendum dit d'initiative partagée aurait justement fait en sorte qu'elle soit inapplicable dans les faits? Création d'un droit pour l'effet de donner un droit sans véritablement le faire pour autant... habile.


Ce qui est assez drôle est au final cet appel des politiciens de droite d'un référendum alors qu'ils sont eux-mêmes issus d'un gouvernement qui a volontairement fait le choix d'ignorer le référendum au sujet de ce que l'on a appelé par la suite le traité de Lisbonne et qui avait été refusé par la population sous Chirac. L'hôpital qui se fout de la charité en vérité.


Si nous y réfléchissions deux minutes en prenant du recul face aux considérations et au débat pour ou contre le mariage pour tous et que nous nous posions véritablement la question de l'utilité d'ouvrir le référendum aux questions sociétales, on s'aperçoit qu'au contraire ce serait une bonne chose. Comment mieux sonder l'opinion de la société autrement qu'en demandant expressément à la population entière le choix?


Au final cette question du pseudo débat sur l'ouverture du référendum aux questions sociétales fait tellement parler d'elle uniquement parce qu'une partie de la population craint que la réponse ne soit pas celle qu'ils espèrent et préfèrent ainsi ne pas ouvrir la boîte de Pandore.


Ne nous laissons donc pas faussés par les faux semblants et tentons en tant que juristes ou futur juristes de rester objectifs et de prendre du recul par rapport aux choses. Il me semble qu'il n'a jamais été une tare de demander expressément au peuple son avis sur de grandes questions qui bouleversent la société et qu'au contraire cette peur du référendum a provoqué un creusement entre une oligarchie politicienne qui gouverne selon ses idées plus ou moins fondées et les préoccupations véritables d'une population en demande de réformes de fond qui se font attendre sur tous les plans.

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Yn Membre VIP

pizinette, plusieurs points m'ont interrogé.

[Posons-nous] véritablement la question de l'utilité d'ouvrir le référendum aux questions sociétales, on s'aperçoit qu'au contraire ce serait une bonne chose. Comment mieux sonder l'opinion de la société autrement qu'en demandant expressément à la population entière le choix?
Le référendum est un outil dangereux. Certes, l'idée est belle de "demander son avis au peuple", mais les restrictions quant à son usage sont fondées. Le but d'un référendum n'est pas de "sonder" l'avis de la population (les sondages servent à cela), mais d'opérer un choix qui a des conséquences graves (la France doit-elle prendre part à la construction de l'Europe ? etc.)

Ouvrir trop largement le recours au référendum c'est, outre le coût financier, prendre un risque majeur de voir les gens s'engager à la légère sur des sujets fondamentaux.

Les grandes avancées sociales de notre époque n'auraient sans doute jamais été réalisées si le référendum avait été utilisé : l'abolition de la peine de mort ? Elle n'aurait jamais été acceptée. L'introduction de l'IVG ? Encore mois (et Dieu seul sait combien les catholiques étaient excités sur ce sujet). Pourtant, aujourd'hui, l'immense majorité de la population s'en accommode très bien voire s'en félicite.

La question liée est celle de la limite : quand doit-on ouvrir le référendum ? Admettons qu'il en soit ainsi pour le mariage homosexuel, pourquoi ne pas également l'ouvrir pour la question des impôts ? J'estime avoir autant le droit de donner mon avis sur l'imposition (qui me concerne directement) que sur la possibilité pour deux homosexuels de se marier (ce qui ne concerne qu'eux). Pourquoi ne pas faire un référendum sur l'ouverture des magasins le dimanche ? Cette question concerne là encore beaucoup plus de français que la question du mariage homosexuel (qui ne concerne encore une fois que les deux personnes qui vont se présenter devant le maire).

Et l'organisation de l'Euro de football ? Une large part des dépenses va être payée avec nos impôts, j'estime qu'ils pourraient servir à autre chose. Pourquoi ne pas avoir fait un référendum ? C'est pourtant une question de société, des forces de l'ordre seront affectées à l'événement, les médias vont massivement le relayer, le tourisme va se relancer, le secteur hôtelier également, etc.

Bref, les exemples pourraient être multipliés. Ouvrir le référendum aux "questions de société" risque de générer une augmentation qui n'est pas souhaitable de cet outil.

Au final cette question du pseudo débat sur l'ouverture du référendum aux questions sociétales fait tellement parler d'elle uniquement parce qu'une partie de la population craint que la réponse ne soit pas celle qu'ils espèrent et préfèrent ainsi ne pas ouvrir la boîte de Pandore.
C'est un autre dérive du référendum. Le fameux "non" au traité constitutionnel européen n'était pas un "non" à l'Europe mais un désaveu de la politique menée par J. Chirac.

Ne nous laissons donc pas faussés par les faux semblants et tentons en tant que juristes ou futur juristes de rester objectifs et de prendre du recul par rapport aux choses.
Totalement d'accord, reste à déterminer lesquels sont réels et lesquels sont faux.

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« Je persiste et je signe ! »

Docteur en droit, Université Paris-1 Panthéon-Sorbonne.

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Je suis d'accord avec vous Yn mais la question de la limite est assez simple à trouver. Où est la limite entre demander par référendum si le pays candidate pour organiser l'Euro de Football ou si l'on autorise l'ouverture des magasin le dimanche et une question de société comme l'ouverture du mariage aux homosexuels?

Le mariage homosexuel s'il est autorisé va totalement révolutionner la conception de la famille qui est une notion fondamentale du droit français. Bien évidemment tout ne doit pas être balancé dans un référendum. Il faut que cela reste une question qui peut révolutionner le droit et les notions juridiques de notre société et cette limite peut être très facilement posée au sein de la constitution.


Je ne suis pas totalement d'accord avec votre argument présentant que si on avait posé en référendum la question de l'abolition de la peine de mort ou de l'IVG (appelée loi Veil qui a également légalisé le recours à la contraception), ils ne seraient pas passés avec l'accord de la population tout simplement du fait que beaucoup d'intellectuels et de grands penseurs de l'époque s'étaient placés pour la défense de l'abolition (cf le livre de Badinter revenant sur son expérience pour défendre l'abolition de la peine de mort ou les réflexions présentées par Jean Ullmann dans son livre autobiographique "Mémoires d'un président de Cour d'Assises" au sujet de la pertinence ou non de l'abolition de la peine de mort où il présente les deux thèses qui ont court à l'époque). N'oublions pas que grâce à la célèbre affaire de Bobigny en 1972 la défense de la légalisation de l'avortement et de la contraception féminine avait fait un grand bon en avant permettant sa légalisation.


Dans ces deux cas la société s'était confrontée avec une obligation pour la justice de défendre des sujets de droits en état de faiblesse juridique et d'un autre côté la défense de pensées que je qualifierai d'arriérées et de dogmatisées dues à une conception religieuse des choses. N'oublions pas que les associations catholiques lors des débats sur la légalisation de l'avortement avaient appelé les femmes qui y avait eu déjà recours de tueuses d'enfants ! On a simplement aujourd'hui un cas similaire de fait de société.

Aux vues des conflits qu'ont posé dans la société française des années 1970-1980 doit-on considérer que de fait, les avancées sociales doivent toujours être réalisées dans le conflit avec un gouvernement qui doit poser ces projets de lois sociales de manière quasi autoritaire comme un parent avec des enfants réfractaires à l'obligation de devoir aller se coucher à une certaine heure?

Je pense qu'il y a un terrible manque de confiance envers la population. Les avancées sociales doivent se faire en fonction de deux principes essentiels :

- Le principe d'évolution logique de la société
- La principe de protection par le droit de personnes en situation de fragilité juridique face à une absence de règle.


Ensuite les raisons d'un éventuel "non" à un référendum n'appartiennent qu'à la population ce que vous qualifiez de désaveu politique n'est que l'interprétation que les politiciens de droite en ont fait à l'époque. L'avez-vous au moins lu ce traité qui nous avait été communiqué à tous? Pouvez-vous réellement affirmer que c'était une bonne chose pour l'Europe? Beaucoup disent que le traité de Maastricht défendu par Mitterrand était une erreur. Beaucoup ont eu à dire que c'était de même pour la politique de Nicolas Sarkozy que d'imposer via le Parlement un traité dont les français ne voulaient pas car moi je l'ai lu à l'époque et de ce que je m'en souviens (je l'ai conservé je pourrai toujours le relire pour me rafraîchir la mémoire), ce n'était vraiment pas le meilleur traité international au monde loin de là ! Pourquoi? parce qu'il s'agissait de proposer une sorte de centralisation politique de l'Union Européenne autour de Bruxelles. Ce dont les gens ne voulaient pas !


Ainsi la peur d'un débordement de l'utilisation de ce référendum n'est pas à craindre du fait de la peur des gouvernement de demander aux populations leur avis et de plus du coût de ces derniers comme vous l'avez évoqué plus haut dans votre argumentation. De ce fait, comme je l'ai dit, rien ne justifie véritablement cette peur de laisse parler la population en tant que nation libre de choisir son destin plutôt que de se le laisse dicter comme nous le voyons par une oligarchie politique, coupée des préoccupations véritables de la population (la légalisation du mariage homosexuel, beaucoup de politologues l'ont convenu, n'était pas une priorité législative compte tenu de la conjoncture actuelle). Et je ne vois pas en quoi une telle chose serait dangereuse bien au contraire...


Au contraire ce qui me semble dangereux est de considérer le référendum, autrement dit l'opinion du peuple, comme quelque chose de dangereux. Bien évidemment pousser la liberté de parole du peuple souverain au paroxysme décrit par Rousseau dans "Du Contrat Social" pousse à l'autoritarisme mais dans mon argumentation il n'est en aucun cas question de cela. Il est question tout simplement d'inclure au sein du référendum les questions de sociétés qui touchent des points fondamentaux d'ordre autant sociologique que juridique et non d'ouvrir la porte vers tout et n'importe quoi.

Pardonnez-moi mais je doute que l'on puisse qualifier la pratique du Royaume-Uni qui utilise énormément le référendum pour de grandes décisions ou des États des États-Unis qui utilisent au niveau local le référendum dit abrogatif (dont notre Constitution actuelle ne permet pas le recours) comme étant une pratique dangereuse mais au contraire un élément fédérateur de démocraties (monarchiques ou non) aussi stables que celles-ci.

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Yn Membre VIP

J'ai l'impression que tu es plus dans l'argumentation partisane que juridique, voire dans l'idéologie pure et simple de la démocratie directe.

Le mariage homosexuel s'il est autorisé va totalement révolutionner la conception de la famille qui est une notion fondamentale du droit français
Pourquoi cela ? Autoriser le mariage homosexuel, c'est seulement et seulement dire : vous pouvez bénéficier du régime du mariage.

Qu'est-ce à dire ? Être soumis au régime de communauté légale, bénéficier des avantages matrimoniaux (donation entre époux, etc.) et successoraux (donation intégral au dernier vivant, droit au logement, droit viager, la quotité disponible spéciale, et j'en passe, un beau programme que tu auras l'occasion d'étudier à partir du M1).

Je pense que l'on peut s'accorder là-dessus : la conception de la famille n'en sera pas "totalement révolutionnée" comme tu peux l'affirmer. Sauf si tu considères qu'il est totalement contraire au droit français d'affirmer qu'un homme puisse tenir ses droits successoraux d'un autre homme, mais il faut alors m'expliquer pourquoi : deux hommes peuvent se consentir des donations, personne ne s'en offusque.

Les avancées sociales doivent se faire en fonction de deux principes essentiels :

- Le principe d'évolution logique de la société
- La principe de protection par le droit de personnes en situation de fragilité juridique face à une absence de règle.

Il est curieux de constater que la position des homosexuels répond parfaitement à ces deux critères : c'est une évolution de la société, évolution d'ailleurs reconnue dans de nombreux pays (Belgique, Argentine, Suède, Pays-Bas, Norvège, Islande, Canada, Afrique du Sud, Portugal, Espagne, ...) et qu'ils sont dans une situation de fragilité juridique. Cette fragilité juridique est certes d'ordre patrimonial, mais elle est tout de même présente. Pourquoi un couple homosexuel ne pourrait-il pas bénéficier de l'égalité patrimoniale qu'accorde le mariage ?

Enfin,
L'avez-vous au moins lu ce traité qui nous avait été communiqué à tous? Pouvez-vous réellement affirmer que c'était une bonne chose pour l'Europe?
Le référendum était une pure aberration : n'importe qui pouvait aller lire le traité, mais le comprendre... J'étais à l'époque en licence et je peux affirmer que très peu de gens avaient la capacité pour comprendre la portée d'un tel texte (voir les discussions de l'Académie de droit international de La Haye où même les plus grands pontes du Droit de l'UE n'arrivent pas s'accorder sur ce texte). Si les plus éminents spécialistes ne pouvaient comprendre un tel traité, je doute fort que les français l'aient pu.

Je suis maintenant en doctorat, mon sujet est très lié au droit de l'UE et j'ai le sentiment de ne pas encore comprendre la globalité de ce texte ou du suivant qui l'a relayé. Je ne suis d'ailleurs pas certain que cela soit possible car les dimensions sont juridiques, économiques, sociales, bref si un quelqu'un arrive à me l'expliquer je suis preneur.

Les arguments (pour ou contre) autour de ce traité étaient navrants et excessivement réducteurs. Je pense que tu es d'ailleurs dans le lot en affirmant "qu'il s'agissait de proposer une sorte de centralisation politique de l'Union Européenne autour de Bruxelles". C'était le discours dominant et ô combien réducteur formulé par quelques politiques.

Juste pour finir,

Dans ces deux cas la société s'était confrontée avec une obligation pour la justice de défendre des sujets de droits en état de faiblesse juridique et d'un autre côté la défense de pensées que je qualifierai d'arriérées et de dogmatisées dues à une conception religieuse des choses
La position de l'Eglise est identique sur le mariage homosexuel.

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Docteur en droit, Université Paris-1 Panthéon-Sorbonne.

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Pourquoi cela ? Autoriser le mariage homosexuel, c'est seulement et seulement dire : vous pouvez bénéficier du régime du mariage.

Qu'est-ce à dire ? Être soumis au régime de communauté légale, bénéficier des avantages matrimoniaux (donation entre époux, etc.) et successoraux (donation intégral au dernier vivant, droit au logement, droit viager, la quotité disponible spéciale, et j'en passe).


Point du tout, la loi sur le mariage pour tous (si elle est votée) c'est également l'accession des couples homosexuels à l'adoption et à la procréation médicalement assistée (PMA). Votre position est extrêmement réductrice ici. C'est d'ailleurs sur cet accès à ce droit de fonder une famille que le bas blesse du côté des antis d'où leur slogan : un papa, une maman, on ne ment pas aux enfants.

Sur ce point je vous renvoie vers le sujet sur le mariage homosexuel où ont été traités tous ces points.

Je pense que l'on peut s'accorder là-dessus : la conception de la famille n'en sera pas "totalement révolutionnée" comme tu peux l'affirmer. Sauf si tu considères qu'il est totalement contraire au droit français d'affirmer qu'un homme puisse tenir ses droits successoraux d'un autre homme, mais il faut alors m'expliquer pourquoi : deux hommes peuvent se consentir des donations, personne ne s'en offusque.


Justement non on ne s'accordera pas là-dessus puisque de fait, accorder de manière officielle, puisqu'il s'agit bien de cela, révolutionnera la conception de la famille en cela qu'il ne s'agira plus seulement de parler d'un père, d'une mère et de leurs enfants dans les relations décrites au sein du droit de la famille, mais de la possibilité juridique d'une famille composée de deux parents du même sexe et de leurs enfants. Ce qui constitue, tout comme l'a constitué avant la famille monoparentale, une grande évolution de la conception juridique de la famille. Tout ceci n'a rien à voir avec simplement le domaine successoral mais relève bien en premier lieu du droit de la famille. Autrement dit, permettre à un conjoint du même sexe de bénéficier en tant que parent légitime de l'autorité parentale sur l'enfant de son conjoint ou de l'accession pour un couple de même sexe à l'adoption d'un enfant.


Il est curieux de constater que la position des homosexuels répond parfaitement à ces deux critères : c'est une évolution de la société, évolution d'ailleurs reconnue dans de nombreux pays (Belgique, Argentine, Suède, Pays-Bas, Norvège, Islande, Canada, Afrique du Sud, Portugal, Espagne, ...) et qu'ils sont dans une situation de fragilité juridique. Cette fragilité juridique est certes d'ordre patrimonial, mais elle est tout de même présente. Pourquoi un couple homosexuel ne pourrait-il pas bénéficier de l'égalité patrimoniale qu'accorde le mariage ?


Votre vision est décidément extrêmement réductrice... La fragilité juridique des homosexuels ne se limite pas à leurs droits patrimoniaux, tout comme le mariage n'est pas réducteur au simple régime de la communauté de biens. La fragilité des couples homosexuels tient surtout à la procréation tout autant que sur leurs droits successoraux et même plus que cela puisque dans le cadre de la procréation pour des couples lesbiens il s'agit de protéger des femmes qui actuellement, cherchent des géniteurs à tout prix et surtout sur internet au risque même de mettre en danger leur sécurité ainsi que leur santé ce qui est d'ailleurs l'une de leur plus grandes revendications. Pour cela je vous renvoie également à l'autre sujet.


Le référendum était une pure aberration : n'importe qui pouvait aller lire le traité, mais le comprendre... J'étais à l'époque en licence et je peux affirmer que très peu de gens avaient la capacité pour comprendre la portée d'un tel texte (voir les discussions de l'Académie de droit international de La Haye où même les plus grands pontes du Droit de l'UE n'arrivent pas s'accorder sur ce texte). Si les plus éminents spécialistes ne pouvaient comprendre un tel traité, je doute fort que les français l'aient pu.

Je suis maintenant en doctorat, mon sujet est très lié au droit de l'UE et j'ai le sentiment de ne pas encore comprendre la globalité de ce texte ou du suivant qui l'a relayé. Je ne suis d'ailleurs pas certain que cela soit possible car les dimensions sont juridiques, économiques, sociales, bref si un quelqu'un arrive à me l'expliquer je suis preneur.

Les arguments (pour ou contre) autour de ce traité étaient navrants et excessivement réducteurs. Je pense que tu es d'ailleurs dans le lot en affirmant "qu'il s'agissait de proposer une sorte de centralisation politique de l'Union Européenne autour de Bruxelles". C'était le discours dominant et ô combien réducteur formulé par quelques politiques.



Votre argumentation se casse presque d'elle-même. En vous lisant on comprend bien que le référendum n'était pas le problème, bien au contraire. Ce traité en était bel et bien la cause comme je le défendais. Comme vous le dites si bien vous-même, si même des spécialistes ne comprennent pas exactement la teneur d'un traité international comment peut-on que ne serait-ce la mettre en place ou même en vérifier la pertinence par rapport aux besoins de nos sociétés actuelles? On ne le peut tout simplement pas. C'est également l'une des raisons pour lesquelles ce traité était dénué de sens tout simplement et relevait de l'idée de faire du droit pour faire du droit. Je vous remercie de me l'avoir rappelé.


J'ai l'impression que tu es plus dans l'argumentation partisane que juridique, voire dans l'idéologie pure et simple de la démocratie directe.

Mais comment parler d'un outil de démocratie semi-directe tel que le référendum sans ne serai-ce qu'un instant parler de la démocratie dont il en est l'un des pilier à savoir la parole du peuple (dont il est le symbole)? En quoi est-ce partisan que de remettre les choses dans leur contexte? En quoi suis-je partisane dans mes propos? C'est un peu facile d'utiliser ce genre de pseudo argument révélant qu'au contraire vous ne semblez pas en avoir...



La position de l'Eglise est identique sur le mariage homosexuel.


Mais relisez-moi donc un peu où ai-je insinué le contraire? C'est au contraire ce que j'ai affirmé dans la citation même que vous avez faite de cette partie de ma réponse...


En continuant ainsi on va finir à ce que le chien se morde la queue...

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Bonjour,

Cosinus, vous aviez tort, le Conseil constitutionnel a validé la loi sur le mariage pour tous.