Les principes de désignation des héritiers

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Article rédigé par Olivier.

Lien de famille, hiérarchie successorale, place du conjoint survivant, Egalité successorale (représentation et fente successorale)

( dernière mise à  jour par Mathou le 21/10/2006 : réforme du 23/06/2006, loi n°2006-728 portant modification du droit des successions )


{{I.Le lien de famille}}

Ce lien repose sur la parenté, le mariage ou l'alliance. A noter que le lien d'alliance, qui unit l'un des conjoints à  la famille de l'autre, ne crée aucune vocation successorale.

{ {{A. Le lien de parenté}} }

Ce sont tous les rapports qui ne sont ni de mariage ni d'alliance.

Structure de la parenté
La parenté peut être en ligne directe ou collatérale :

- {Ligne directe} : tous les descendants et les ascendants d'une personne. Ce lien peut être plus ou moins proche. Pour calculer la proximité de ce lien, on compte le nombre de générations qui séparent le De Cujus (abréviation : DC) du parent concerné (chaque génération équivaut à  un degré). La vocation successorale joue à  l'infini en ligne directe (c'est-à -dire quelque soit le degré de parenté des successibles)

- {Ligne collatérale} : lien qui unit des personnes qui ne descendent pas exactement de la même ligne, mais d'un auteur commun au moins. Pour calculer les degrés de parenté, il faut remonter à  l'auteur commun : on compte le nombre de générations qui séparent deux parents en ligne collatérale en passant par l'auteur commun. En ligne collatérale, ces ramifications peuvent aller très loin, et la vocation successorale a été limitée par la réforme du 3/12/2001 au 6e degré, sauf à  l'égard des descendants des frères et soeurs, pour lesquels la vocation successorale joue à  l'infini.

On peut également évoquer les notions de ligne et de souche :

- {ligne} : distinction entre les parents du côté de la mère et parents du côté du père

- {souche} : un sous groupe que l'on rencontre à  l'intérieur des descendants ou des collatéraux privilégiés : chaque fois qu'un descendant a lui-même des descendants, il donne naissance à  une souche. Cette notion est très importante dans le cadre de la dévolution successorale grà¢ce au mécanisme de la représentation.


{{ {2.La qualité de la parenté} }}

Elle peut être légitime, naturelle ou adoptive. La vocation successorale est désormais indifférente à  la qualité de la parenté, que les enfants soient des enfants légitimes ou naturels, adultérins ou non (et ce depuis la réforme de 2001 qui a parachevé le travail du législateur de 1972).
Pour les enfants adoptifs, la vocation successorale joue pleinement au profit de l'adopté pleinièrement. Pour le cas de l'adoption simple, la question est plus compliquée en raison de la dualité des liens familiaux. Si l'adopté est le DC, en l'absence de descendants, la succession obéit aux règles suivantes (on parle de succession anomale, puisque l'origine des biens composant la succession va entrer en compte) : un droit de retour légal se manifeste au profit de la famille adoptive et de la famille par le sang qui pourront récupérer les biens reçus par l'adopté à  titre gratuit par ses parents biologiques et adoptifs (art 368-1 cciv). Une fois ces biens restitués, la succession est partagée en deux selon le mécanisme de la fente successorale (cf infra).
Si l'adopté est héritier, il conserve sa vocation successorale à  l'égard de sa famille par le sang et a une vocation successorale complète dans la famille adoptive, mais n'a pas de vocation réservataire à  l'égard des ascendants de l'adoptant.


{ {{B. Le rapport de mariage}} }

Le mariage procure une vocation successorale au conjoint survivant, à  la condition que le mariage existe avant le décès et qu'il soit valable. La nullité du mariage entraîne la disparition des vocations successorales à  l'avenir. Si la nullité est prononcée postérieurement au décès, le conjoint devra restituer la part qu'il a perçue. Bien entendu, le conjoint de bonne foi pourra invoquer la théorie du mariage putatif s'il est de bonne foi pour conserver cette part.
Le mariage doit persister au jour du décès : le prononcé du divorce fera disparaître les vocations successorales. Si le divorce intervient au cours de la procédure, la vocation réservataire seule s'éteint.
En cas de séparation de corps, et depuis la réforme du divorce du 26/05/2004, on distingue les conséquences de la séparation de sa cause (comme pour le divorce d'ailleurs). L'article 301n.cciv prévoit la conservation des droits successoraux par les époux séparés de corps. Si la séparation est prononcée par consentement mutuel, la convention définitive peut inclure une renonciation mutuelle aux droits successoraux conférés par les articles 756 à  757-3 et 764 à  766 cciv.


{{II.La hiérarchie successorale}}

{{ {A.L'ordre} }}

Les divers héritiers sont répartis en ordres appelés à  la succession les uns après les autres. Un héritier d'un ordre préférable, même d'un degré de parenté plus éloigné, exclura un héritier d'un ordre subséquent. Se pose le problème du conjoint survivant qui constitue à  lui seul un ordre.

{1. En l'absence de conjoint successible}

On distingue quatre ordres qui sont préférés comme suit :
1° L'ordre des descendants, qui prime tous les autres
2° Un ordre mixte composé des ascendants privilégiés (père et mère) et les colatéraux privilégiés (frères et soeurs du défunt et leurs descendants), qui viennent ensemble à  la succession en l'absence de descendants
3° L'ordre des ascendants ordinaires (ascendants autres que les père et mère)
4° L'ordre des collatéraux ordinaires (colatéraux autres que les frères et sÅ“urs)

{2. En présence d'un conjoint successible}

art 756 cciv. Le conjoint est appelé à  la succession seul ou en concours avec les parents du défunt :

-L'art 757 cciv précise que quand il vient à  la succession en concours avec des descendants, le conjoint peut prétendre au quart de la succession en pleine propriété, le reste étant attribué aux descendants. Il peut opter également pour un usufruit universel si tous les descendants sont communs aux deux époux

- L'art 757-1 énonce les droits du conjoint en présence d'ascendants privilégiés : un quart de la succession va à  chaque ascendant privilégié, et le reste au conjoint.

- En l'absence d'ascendants privilégiés, le conjoint recueille toute la succession (art 757-2 cciv) : il prime les collatéraux privilégiés sous réserve d'un droit de retour légal instauré par l'article 757-3 cciv :En effet, dans cette hypothèse, les biens reçus de ses père et mère par succession ou donation par le défunt qui se retrouvent dans la succession sont attribués pour moitié au conjoint successible et pour moitié aux collatéraux privilégiés, à  la condition qu'ils soient eux-mêmes des descendants du ou des parents prédécédés à  l'origine de la transmission.

- Le conjoint exclut les ascendants ordinaires sous réserve d'une créance d'aliments que l'ascendant peut faire valoir contre la succession (art 758 cciv). Il prime également les collatéraux ordinaires (comme d'ailleurs avant la réforme de 2001).

{{ {B. Le degré} }}

Au sein de chaque ordre d'héritiers, le classement s'opère selon la règle du degré : l'héritier au degré le plus proche évince les héritiers d'un degré plus éloigné. Cette règle est subsidiaire à  celle de l'ordre : la règle du degré ne joue qu'au sein d'un même ordre pour déterminer l'héritier. Un héritier d'un ordre préférable l'emporte toujours sur un héritier d'un ordre subséquent.

Des principes correcteurs existent afin d'assurer l'égalité des individus, des souches et des lignes.

{{III. L'égalité successorale}}

{{ {A. L'égalité des individus} }}

A l'intérieur d'un même ordre d'héritiers, à  degré égal, l'égalité s'impose entre les héritiers qui se partagent la succession par tête, quelque soit la qualité de leur parenté, comme le rappelle l'article 735 cciv. pour les descendants.
Il est des cas o๠ce partage par tête est écarté, en particulier dans le deuxième ordre, qui est un ordre mixte. Au sein de cet ordre, chaque ascendant privilégié a droit à  1/4 de la succession, le reste se partageant entre les collatéraux privilégiés, par tête s'ils sont au même degré.
Dans les autres ordres, l'égalité est fréquemment corrigée au profit de l'égalité des lignes ou des souches.

{{ {B. L'égalité des souches.} }}

Cette égalité est assurée par la technique de la représentation successorale, qui permet d'éviter les problèmes liés à  la chronologie des décès.

L'exemple qui suit est destiné à  vous permettre de saisir le principe de la représentation successorale :


{Sur la figure ci-dessus, le DC a deux enfants, A et B, dont l'un est prédécédé. Si on respectait la théorie énoncée plus haut, seul B hériterait, et le descendant de A, A1 ne toucherait rien. C'est pourquoi on autorise le mécanisme de la représentation : A1 va emprunter le degré de son auteur A prédécédé, afin de venir à  la succession concuremment avec son oncle. Ainsi, la succession sera partagée par tête : 1/2 pour A1 venant par représentation de son père A, et 1/2 pour B.

L'égalité des souches va encore plus loin :}



{Dans l'hypothèse présentée sur cette figure, A et B sont prédécédés, A a un fils A1 et B a deux enfants B1 et B2. Sans le mécanisme de la représentation, on devrait répartir égalitairement la succession entre A1, B1 et B2, ce qui serait contraire à  l'égalité des souches et spolierait A1. Ainsi, par le mécanisme de la représentation successorale, A1 aura droit à  la part de son père A, soit la moitié de la succession, l'autre moitié se partageant entre B1 et B2 venant tous deux à  la succession par représentation de leur père B, et touchant chacun 1/4 de la succession. En cas de renonciaition de B2, c'est B1 qui héritera de la part totale de son auteur B.}

{1.Domaine de la représentation}

- La représentation joue uniquement dans les successions descendantes dans l'ordre des descendants et des collatéraux privilégiés. Dans l'ordre des descendants, elle joue à  l'infini en ligne descendante (art 752 cciv). La seule limitation en ligne directe descendante à  la représentation est l'exigence de l'existence d'une pluralité de souches (les descendants d'un enfant unique n'ont pas besoin d'invoquer la représentation et viennent à  la succession de leur propre chef).

- Dans l'ordre des collatéraux privilégiés, la représentation est admise en faveur des enfants et des descendants de frères et soeurs et joue à  l'infini à  leur profit.

- Elle est exclue dans les autres ordres d'héritiers, o๠le parent le plus proche en degré exclut celui d'un degré plus éloigné (hors jeu de la fente que nous verrons plus loin).


{Conditions de la représentation:}

- le représenté doit être prédécédé ou indigne. La loi du 23/06/2006 a complété l'article 754 Cciv : il est désormais possible de représenter un ascendant renonçant dans une succession en ligne directe ou collatérale ( al. 2 ), afin de favoriser les transmissions transgénérationnelles de patrimoine. En cas de concours entre des enfants conçus postérieurement à  l'ouverture de la succession et les enfants venus en représentation, ces derniers rapportent à  la succession du représenté les biens dont ils avaient hérité - ce rapport obéit aux règles des libéralités, la solution s'inspirant du mécanisme de l'indignité.

- Le représentant est le descendant le plus proche en degré du représenté, peu importe la qualité de la filiation.

- Le représentant doit être apte à  succéder au DC. Les conditions sont à  vérifier par rapport au DC et non au représenté : le représentant ne doit pas être indigne du DC, mais peut être indigne du représenté (depuis la loi du 3/12/2001), art 755 cciv.
L'art 755 al 2 cciv prend en compte les conséquences possibles de la représentation de l'indigne (qui par hypothèse n'est pas décédé) : les enfants de l'indigne conçus avant l'ouverture de la sucession dont l'indigne avait été exclu apporteront à  la succession de l'indigne les biens dont ils avaient hérité en son lieu et place s'ils viennent en concours avec d'autres enfants conçu après l'ouverture de la succession du DC.

{Effets de la représentation}

Le représentant emprunte le degré de son auteur mais ne peut obtenir dans la succession que la part que le représenté aurait eue, assortie des charges qui l'accompagnent.


{{III. L'égalité des lignes : la fente successorale}}

La fente a pour but de maintenir l'égalité des lignes paternelle et maternelle. Elle est prévue par l'article 747 cciv pour les successions dévolues aux ascendants et 749 pour celles dévolues aux collatéraux ordinaires. Elle est exclue pour les successions dévolue aux collatéraux privilégiés.
Le procédé de la fente est également employé à  d'autres fins.

{{ {1. la fente successorale classique} }}

Ce mécanisme permet dans l'ordre des ascendants d'écarter la règle de priorité du degré au profit des lignes paternelle et maternelle. On divise donc la succession en deux : 1/2 pour la ligne maternelle et 1/2 pour la ligne paternelle.
A l'intérieur de chaque ligne, l'héritier le plus proche en degré exclut les autes, et à  égalité de degré on procède à  un partage par tête.
Si une ligne n'a pas d'héritier, alors sa part est dévolue à  l'autre ligne.
Le fonctionnement est le même au sein de l'ordre des collatéraux ordinaires.

{{ {2. La fente pour la succession de l'adopté simple} }}

Le fente ne joue que lorsque l'adopté simple décède sans descendants. La division s'opère ici entre deux familles et non entre deux lignes. Après avoir réglé le droit de retour des biens (cf supra), le surplus des biens se divise en deux parts entre la famille d'origine et la famille adoptive sans préjudice des droits du conjoint survivant sur l'ensemble de la succession.

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Votre cours est tres clair, merci beaucoup, grâce àvous j'ai bien compris la représentation. Une fois de plus merci.