Intervenant
Inscrit : 08/11/08
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Cette réforme, au-delà des bêtises médiatico-politiques habituelles, est un faux débat, selon moi. Quelques remarques en vrac :
1/ On a trop tendance à croire que le doctorat recouvre une et unique réalité : c'est faux, il y a doctorat, doctorat, doctorat et doctorat (et ainsi de suite). De même qu'il faut distinguer selon les M2 en droit, il faut aussi distinguer les thèses produites (évidemment, selon des critères différents).
Que le grand public - politiques, médias et de très nombreux étudiants inclus - assimile un docteur à un autre... Soit. Mais je vous assure que ceux qui ont vraiment besoin de docteurs savent évaluer la qualité du travail.
2/ Chacun a ses torts dans la dévalorisation du doctorat :
- L'Etat qui a institué plusieurs grandes écoles, depuis 1945, ce qui génère, au plan international, une illisibilité totale des diplômes français. Personne ne comprend notre concurrence université/école d'ingé/grandes écoles, donc ce n'est évidemment pas vendeur.
- L'Université : le doctorat est dévalorisé en grande partie à cause des professeurs eux-mêmes qui acceptent trop de doctorants, poussent trop de doctorants à faire des thèses alors qu'il ne s'agit pas de leur premier objectif (on connait tous un major de promo en M2 qui va ramer comme pas possible en thèse tout simplement parce qu'il n'est pas fait pour ça). Pire encore, certains sont même poussés à faire des thèses tout simplement pour que le contrat doctoral soit pourvu et qu'il ne soit pas attribué, l'année suivante, à une autre école doctorale.
- Les doctorants eux-mêmes : beaucoup trop de doctorants profitent de leur statut, ne font rien, produisent des thèses de qualité médiocre qui n'apportent rien, à aucun plan (petite vérification : allez consulter les thèses non publiées dans vos BU respectives, vous verrez, ce n'est pas un cas isolé). Et encore, je parle des thèses juridiques : j'ai pu consulter des thèses soutenues en sciences humaines, notamment les "nouvelles filières" (très haut numérotées au CNU), c'est affligeant.
Bref, comme dans tous les milieux, le doctorat n'échappe pas à la règle : il y aura toujours des gens pour faire le job et les touristes qui viendront noircir le tableau.
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« Je persiste et je signe ! »
Docteur en droit, Université Paris-1 Panthéon-Sorbonne.