Bonjour.
Cette année nous avons légérement modifiés la méthodologie pour les analyses d'arrêt, et je voulais vous soumettre une analyse d'arrêt que je viens de réaliser pour voir si, selon vous, elle est conforme aux attentes globales pour une analyse d'arrêt.
merci !
L'arrêt à analyser: Cass.civ 1ere 23 février 1970
L’arrêt étudié est relatif au vice du consentement que constitue le dol.
Un acheteur se rend à une vente aux enchères publiques où il achète à des époux, assisté de deux experts, deux sièges présentés au catalogue comme étant deux modèles « marquises Louis XV ». Après avoir dégarnis et partiellement décapés ces sièges, l’acquéreur fait constater par un troisième expert qu’il s’agissait en réalité de sièges dits « Bergères », reconstitués avec des éléments faisant penser au modèle « marquises Louis XV ».
Une première instance est intentée par l’acquéreur alors demandeur, dont nous ne connaissons la teneur.
Des suites de ce jugement de première instance, la cour d’appel de Paris est saisie. Elle rend son arrêt le 30 mai 1968. Elle prononce la nullité de la vente et ordonne la restitution des sièges et du prix.
Les époux forment un pourvoi en cassation.
Le pourvoi est fondé sur trois moyens.
La première chambre civile de la cour de cassation rend son arrêt le 23 février 1970. Elle rejette les deux premiers moyens du pourvoi. Elle casse l’arrêt rendu par la cour d’appel au visa de l’article 20 du décret du 11 décembre 1945 pour défaut de base légale dans la limite du dernier moyen admis.
Le premier moyen fait grief à l’arrêt d’avoir prononcé la nullité de la vente et d’ordonner la restitution des sièges et du prix. Il fait valoir que le décapage et le dégarnissage entrepris par l’acquéreur sur les meubles constituent des atteintes à leur intégrité et diminuent leur valeur, faisant ainsi obstacle à l’annulation de la vente ou du moins imposait la réduction du prix à restituer.
La cour de cassation note que la nullité de la vente peut être prononcée dès lors que la chose vendue a conservé son individualité avec ses qualités spécifiques. En l’espèce, en énonçant que les actions entreprises par l’acquéreur sur les meubles avaient permis d’en dégager la véritable nature et que ce procédé était courant et ne peut être considéré comme une détérioration, la cour d’appel a justement considéré l’action en nullité sans réévaluation du prix à restituer.
Le deuxième moyen reproche à l’arrêt d’avoir omis de répondre aux conclusions dans lesquelles les vendeurs précisaient que des meubles sont considérés d’une personne lorsque la majeure partie des éléments les constituant proviennent de cette même personne.
La cour de cassation retient que la cour d’appel a constaté que « l’erreur sur la substance s’entend non seulement de celle qui porte la matière dont la chose est composé mais aussi de celle qui a trait aux qualités substantielles d’authenticité et d’origine », et que l’acquéreur a pu croire acquérir deux « marquises ». Elle estime que la cour d’appel a souverainement interprété les faits en retenant que la qualité substantielle sans laquelle l’acquéreur n’aurait pas acheté s’appliquait aux « marquises ». Ainsi, la cour d’appel a répondu aux conclusions des vendeurs prétendument délaissées.
Enfin, la cour d’appel a déclaré irrecevable l’action en garantie des époux contre le commissaire priseur et les experts ayant assistés à la vente au motif que l’action en réparation fondée sur leurs fautes respectives ne permet pas de les appeler à garantir les époux de la condamnation à restituer un prix ne correspondant pas à la valeur des sièges vendus.
La cour de cassation retient que l’article 20 du décret du 11 décembre 1945 dispose que les indications portées au catalogue d’une vente aux enchères publiques engagent la responsabilité solidaire des experts du du commissaire priseur. Or en statuant ainsi, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision.
Le problème de droit posé est le suivant:
Des modifications apportées à des meubles par l’acquéreur dans le but de vérifier l’authenticité de ces derniers peuvent-ils remettre en cause la nullité de la vente dans le cadre d’une action en nullité pour dol ?
Dernière modification : 12/10/2019 - par RDelamarre