Bonjour à tous.
Voici ma version de l'arrêt Cass. soc., 14 décembre 2004, Auchan.
Merci de me dire ce que vous en pensez. !!!!!!
Le droit du travail constitue l’un des pans les plus importants et les plus source de litiges surtout lorsque la conjoncture économique est défavorable aux salariés, avec pénurie des offres d’emploi. Malgré ses garanties, le contrat de travail, même à durée indéterminée n’est pas une citadelle imprenable et de nombreuses dispositions du Code du travail permettent à l’employeur de procéder à des modifications de ce contrat. Parmi ces solutions, la situation des cessions d’entreprises ou d’activités est une source constante de litiges : il s’agit des situations où un employeur – le cédant – cède son activité, ou une branche de son activité à une nouvelle société – le cessionnaire.
C’est sur cette situation que porte l’arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation du 14 décembre 2004 concernant le transfert de son activité de transport par la société Auchan.
La société Auchan a cédé à la société SATL à partir du 1er février 1998 son activité de transport incluant 114 salariés. Son employeur a informé l’ensemble des salariés de la décision de transfert.
Parmi ceux-ci, M. X., qui exerçait la fonction de chauffeur-livreur, a fait savoir le 31 janvier 1998 à son employeur qu’il refusait ce changement. Son employeur l’a licencié en raison de son refus de passer au service du cessionnaire.
M. X. a saisi le Conseil des Prud’hommes pour obtenir de son employeur le paiement de dommages et intérêts et d’indemnités de préavis et de congés payés suite à son licenciement dont il souhaite également faire reconnaître la nature économique. Par décision du 6 janvier 2003, le Cour d’appel de Colmar a donné en partie raison au salarié et a condamné la société Auchan au paiement des sommes demandées au motif suivant : « la cession de l’activité de transport à la société SATL, accompagnée de la reprise par l’entreprise cessionnaire du parc automobile, constitue le transfert d’une entité économique autonome dont l’activité est poursuivie et relève des dispositions de l’article L. 122-12 du Code du travail, qui sont d’ordre public, s’imposent tant aux employeurs qu’aux salariés et avaient pour effet de transférer le contrat de travail de M. X... à la société SATL, laquelle était devenue de plein droit l’employeur de ce dernier à compter du 1er février 1998 ». La Cour d’appel reconnaît dans cette situation que le contrat de travail a été normalement poursuivi avec le nouvel employeur par application du mécanisme de l’article L.122-12 du Code du travail et donc que la société Auchan n’avait pas la capacité à notifier son licenciement à un salarié qui n’était pas le sien. En conséquence de quoi, la société Auchan doit au salarié, qui n’avait pas demandé au nouvel employeur la poursuite de son contrat de travail, des indemnités en réparation du préjudice né du licenciement illégal.
Subsidiairement, la Cour d’appel a rejeté la qualification de licenciement pour motif économique au motif que le licenciement était dû à un refus du salarié d’être tranféré et n’a aucun caractère économique.
La société Auchan s’est pourvue en cassation contre cette décision.
La question de droit à laquelle a du répondre la Cour de cassation concernait le refus pour le salarié de travailler pour son nouvel employeur suite à la cession de la branche d’activités qui l’employait et l’application de l’article L.122-12 du Code du travail à cette situation. Le licenciement notifié dans ce cas par l’ancien employeur au salarié peut-il produire ses effets ? Le salarié concerné est-il en mesure d’obtenir des indemnités pour licenciement de son ancien employeur ?
La Cour de cassation a cassé, sans renvoi, l’arrêt d’appel au motif que « le changement d’employeur résultant de plein droit du transfert d’une entité économique autonome s’impose tant aux employeurs successifs qu’aux salariés concernés » et que le licenciement était privé d’effet. En conséquence de quoi, le salarié ne peut prétendre à aucune indemnité ni paiement de dommages et intérêts.
La Cour de cassation juge l’affaire au fond, en vertu des stipulations du nouveau Code de procédure civile, et casse et annule toutes les dispositions de l’arrêt d’appel.
Afin de comprendre la solution de la Cour de cassation, il conviendra, dans un premier temps, d’analyser les arguments permettant d’appliquer l’article L.122-12 était au cas d’espèce (I), puis de constater les conséquence de son application (II).
I – Une application de l’article L.122-12 du Code du travail littérale et conforme à la jurisprudence de la Cour de cassation :
Nous allons voir que l’interprétation littérale du texte qu’a faite la Cour de cassation a pu poser des problèmes de délimitation (A) avant de voir que la décision est conforme à sa jurisprudence antérieure (B).
A – l’interprétation littérale du texte :
1 – l’énoncé de l’article L.122-12 du Code du travail :
L’article L.122-12 du Code du travail (relatif à la cession d’activité dans son 1er alinea) stipule dans son 2nd alinea : « S’il survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise ».
Il s’agit d’un texte extrêmement puissant, car il consacre le transfert des contrats de travail avec une personne morale différentes de celle avec qui les salarié avaient pu contracter, en opposition complète avec le droit général des obligations.
Malgré sa rédaction qui s’est voulue la plus exhaustive possible, la jurisprudence ne s’est pas cantonnée à cette liste et a largement utilisé la voie offerte par la formulation volontairement dynamique à travers le terme « notamment » pour élargir l’application de ces dispositions à toute modification de la situation juridique de l’employeur.
Dans le cas d’espèces, le juge a fait une interprétation littérale, puisqu’il s’agissait d’une cession – très probablement une vente – à une société, cas prévu par l’article « … vente… ».
Pourtant, les diverses situations qui se sont présentées à l’interprétation de la Cour de cassation l’on conduite à affiner, parfois dans la douleur, l’étendue du champ d’application de l’article.
2 – la difficile délimitation du champ d’application du L.122-12 :
La question s’est posée concernant différentes situations : externalisation ou réintégration d’activité, changement de sous-traitant…
La Cour de cassation a tout d’abord subordonné l’application de l’article à la condition de l’existence d’un lien de droit entre les deux sociétés (arrêt de la Chambre sociale du 12 juin 1986, sté Socorail) à propos de la demande en paiement d’indemnités de licenciement du personnel d’une société d’exploitation de trafic-fer sur l’étang de Berre dont l’activité avait été attribuée, sans changement, à un nouveau prestataire et qui avait licencié son personnel.
Cette condition a conduit la Cour à faire, dans un célèbre arrêt – critiqué – de sa Chambre sociale (12 février 1991, sté Prima nature c/ M. Lourd) une application des dispositions au cas de transfert d’un simple outil de production : ainsi, le juge a pu décider que la vente par une entreprise de transport d’un camion à une nouvelle société emportait le transfert automatique du chauffeur du camion !
Toutefois, les juges ont systématiquement refusé d’appliquer ces dispositions au cas de la perte de marché. Ainsi, dans 2 arrêts du 15 novembre 1985 (sté Nova services c/ groupe Service France de la Chambre sociale et M. Martin c/ société Nettoitout de l’assemblée plenière), concernant des marchés de nettoyage, les juges ont refusé l’application du principe au motif qu’une perte de marché ne constitue pas une modification de la situation juridique de l’employeur.
La jurisprudence du lien de droit a été mal perçue par la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) qui, en 1988 à appliqué dans 3 arrêts la Directive européenne du 14 février 1977 concernant l’harmonisation des législations nationales concernant le maintien des droits des travailleurs (Directive jamais ratifiée par la France qui, avec cet article L.122-12 du Code du travail possédait déjà un mécanisme juridique approprié), au cas des transferts des contrats de travail, de la perte de marché et de l’externalisation. La CJCE a réaffirmé qu’il pouvait y avoir transfert automatique des contrat de travail en l’absence d’un lien de droit entre les employeurs successifs et que le seul critère d’application était l’existence d’une « activité économique ayant conservée son identité et dont l’activité est poursuivie ou reprise ».
La jurisprudence de la Cour de cassation n’était plus, à ce moment, conforme au droit européen, et elle a dû se plier à la juridsprudence de la CJCE de 1988.
Elle l’a fait dans 2 arrêts du 16 mars 1990 en Assemblée plénière (terrain de camping du Bois de Boulogne, consistant en un pourvoi formé dans l’intérêt de la loi par le Procureur général sur décision d’appel devenue définitive par expiration du délai de pourvoi puis sté nîmoise de tauromachie et spectacle c/ Mme Bodrero Sereu) où le juge a fait une exacte application de la Directive de 1977 et définitivement enterré la notion de lien de droit pour reconnaître que même en l’absence de ce lien, les contrats de travail étaient automatiquement transférés au nouvel employeur. En revanche, le même jour, les juges ont confirmé leur attachement à la distinction entre transfert d’activité et simple perte de marché à propos d’une entreprise de nettoyage dont 2 salariées étaient affectées à un seul client qui avait internaliser cette mission et mis fin au contrat d’entretien, mais dont le juge a estimé que ce client n’était qu’un client parmi d’autres et que la situation ne justifiait pas qu’il reprenne les salariées (sté ONET c/ Mmes Guillemin et Mallet).
Toutefois, la Cour de cassation a développé une nouvelle théorie lui permettant de garantir la sécurité juridique dans l’application de cet article.
B – l’interprétation conforme à la jurisprudence :
1 – la notion d’ensemble organisé :
La difficulté pour les juges, après la jurisprudence du 16 mars 1990 influencée par celle de la CJCE, a été de définir la notion d’« entité économique ».
Elle l’a fait dans un arrêt du 6 novembre 1991 de la Chambre sociale en considérant l’entité économique au sens de la Directive de 1977 comme « un ensemble organisé composé de moyens d’exploitation ». Dans un arrêt de la Chambre sociale du 7 juillet 1998 (MGEN), la Cour de cassation casse l’arrêt d’appel qui avait débouté les salariés de leurs prétentions au motif de l’inapplicabilité au cas de l’art. L.122-12 du Code du travail dans avoir recherché si le service d’examens médicaux constituait une entité économique, qu’elle a défini comme « un ensemble organisé de personnes et d’élément corporels ou incorporels permettant l’exercice d’une activité économique qui poursuit des objectifs propres ». Puis dans un arrêt du 11 juin 2002 (Grands garages de l’avenir), cette même Chambre a appliqué la définition au cas de 33 salariés d’un concessionnaire Peugeot dont la concession avait été retiré au profit d’un autre garage et qui avait continué à donner du travail aux salariés. La Cour de cassation a considéré que le transfert d’une concession, élément incorporel, suffisait à permettre l’application de l’art. L.122-12.
2 – les conséquences de cette nouvelle jurisprudence :
Par cette nouvelle doctrine, la Cour de cassation a pu maintenir sa jurisprudence de la simple perte d’un marché en considérant qu’elle n’était pas suffisante pour définir un transfert d’activité économique.
Elle a également affirmé la large application du mécanisme au secteur public et plus particulièrement aux services publics industriels et commerciaux puis aux services publics à caractère administratif (Chambre sociale, 2 mars 1999, SAFER de la Corse où la SAFER qui avait, en vertu de ses missions de service public, préempté une exploitation agricole et qui, temporairement avait dû assurer le fonctionnement de l’exploitation avant son rachat par un exploitant aricole, a dû reprendre les salariés du premier exploitant).
Dans son arrêt du 14 décembre 2004, on voit que la Cour de cassation a retenu l’interprétation – conforme à sa jurisprudence antérieure – de la Cour d’appel qui avait mentionné « le transfert d’une entité économique dont l’activité est poursuivie ».
Il s’agit maintenant d’analyser les conséquences pratiques de l’application du L.122-12.
II – Les conséquences de l’article L.122-12 du Code du travail :
A – une règle d’ordre public :
L’article L.122-12 énonce un principe d’ordre public, auquel il est donc par définition, impossible de déroger.
1 – elle s’applique à toutes les parties :
La première conséquence de ce principe, est que l’article L.122-12 s’applique à toutes les parties au litige : au nouvel employeur qui se voit automatiquement transférer les contrats de travail, au salarié qui dépend dorénavant de l’autorité du nouvel employeur et de l’ancien employeur qui perd automatiquement toutes ses prérogatives de direction.
Dans le cas d’espèce, M. X. est devenu au jour du 1er février 1998, salarié de la société cessionnaire et devait par conséquent se présenter à son nouvel employeur et assurer son travail.
L’article énonce une règle protectrice de l’emploi et non du salarié. La Chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt du 16 janvier 1990 (société MGM c/ M. Steevens) a considéré que le directeur d’un magasin refusant de travailler pour son nouvel employeur et à qui son ancien employeur a fait deux nouvelles propositions, peut être licencié pour faute grave sans indemnités de licenciement, la société cédante ne pouvant pas être responsable de la rupture du contrat de travail. Cette jurisprudence s’applique par conséquent au cas d’espèce, M. X. ayant refusé le transfert à un nouvel employeur ne peut rendre son ancien employeur responsable de la rupture de son contrat de travail.
2 – elle s’applique à toutes les situations :
La Chambre sociale Cour de cassation a également pu énoncer que les dispositions sont applicables à toutes les situations : arrêt maladie du salarié pendant le transfert (16 mars 1999, sté Trailer et Container c/ M. Laguna), dirigeant de société (13 novembre 2001, sté Nouvelle boucherie du Parmelan c/ M. Pagnon) ou contrat d’apprentissage (28 mars 1996, Mlle Rodriguez c/ Mme Ahmed).
B – les effets juridiques :
1 – le salarié était automatiquement maintenu dans son contrat :
Le salarié est maintenu dans son contrat de travail, avec le nouvel employeur, avec toutes ses dispositions (rémunération, ancienneté, droit aux congés payés, solidarité des employeurs successifs…). Il n’y a aucune obligation faite aux parties de matérialiser ce transfert de quelque façon que ce soit (par un écrit, par une présentation, par un courrier…). La non présentation d’un salarié à son nouvel employeur pourra être envisager comme une démission tandis que le refus de se présenter constitue une faute grave justifiant son licenciement.
2 – l’absence de faute de l’ancien employeur :
Dans tous les cas, la faute de l’ancien employeur ne saurait être recherchée : dès le transfert, il y a transfert automatique des contrats de travail et l’ancien employeur ne dispose dès lors d’aucun pouvoir de direction. C’est ce qu’a affirmé la Cour dans l’arrêt du 28 mars 1996 (cité supra) : le maître d’apprentissage de Mlle Rodriguez – qui voulait voir requalifier son contrat d’apprentissage en contrat de travail avec effet rétroactif au jour de la cession du fonds de commerce de boulangerie – avait signé avec elle – après le transfert – une constatation de fin de contrat d’apprentissage. Le juge a considéré que cet écrit était sans valeur car le maître d’apprentissage ne bénéficiait alors plus d’aucun pouvoir de direction sur son ex-apprentie.
Dans le cas d’espèces, l’ancien employeur ne bénéficiait d’aucun pouvoir de licenciement du salarié en raison du transfert automatique du contrat de travail. C’est la raison pour laquelle la Cour de cassation a d’une part considéré le licenciement comme illicite car signé par un non-employeur et jugé l’affaire sur le fond.
Il resterait éventuellement au salarié, à faire valoir auprès de son nouvel employeur de la rupture unilatérale de son contrat de travail. En effet, sans aucune réaction de la part de ce dernier, il est encore susceptible de faire partie des salariés de son nouvel employeur…
bonjour,
je suis étudiante en master 1 juriste européen à la fac de bayonne.
j'ai jeté un coup d'oeil à ton commentaire.
apparement, tu as des connaissances mais tu devrais les appliquer avec plus de rigueur.
il me semble que ton plan ne répond pas à ta problématique...
de plus, tes titres ne vont pas!!!
un petit conseil, pour tes I et II, commence toujours par "un arrêt montrant que..." cela te permet de toujours coller à l'arrêt car il ne faut pas oublier que ce qui fera que tu auras un 14 ou 15/20 c'est rester fidèle à l'arrêt!!!
Bonjour, quelques règles d'or pour les titres:
- titres courts
- jamais de verbe
- titres comportant un adjectif: c'est facile il suffit de trouver le bon adjectif
- l'idéal: des titres qui se répondent
- à éviter dans les titres: "solution", "pratique" "théorie"; y préférer: "bienvenu", "regrettable", "justifié", "cap"
- le coeur du devoir: IB/IIA
Merci pour tout
Je vous signale que j'ai posté d'autres sujets.
ciao