Bonjour, je dois résoudre un cas pratique sur les circulaires. Je viens donc vers vous afin de vérifier si mon résonnement semble correct.
Voici le cas :
Madame Schmol gère un hôtel-restaurant à Royan, commune de bord de mer qui accueille toute l’année des curistes venus pour les eaux thermales réputées. Elle vient d’apprendre que par une circulaire du 12 février 2020, la ministre de la Santé a interdit aux services de l’assurance-maladie de rembourser les cures réalisées ailleurs qu’en zone de montagne.
Craignant pour son commerce, Madame Schmol vous consulte pour connaître les moyens qu’elle aurait à sa disposition pour contester ce texte.
Je pensais faire plusieurs syllogismes :
- Es-ce que une circulaire impérative ? (à mon avis oui donc elle est attaquable)
- Es-ce que les conditions de recevabilité sont remplies pour faire un recours pour excès de pouvoir ? (oui mais les 2 mois sont dépassés)
- Faut-il envisager une exception d'illégalité ? oui
En espérant que vous pourrez m'aider, merci.
Bonjour,
à ma connaissance il y a deux type de circulaires, les circulaires interprétatives et les circulaires réglementaires.
Seules sont attaquables les circulaires partiellement ou totalement réglementaires.
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Zénas Nomikos, BAC+4 en Droit, Université Grenoble Alpes.
De la discussion jaillit la lumière.
Bonsoir,
A mon sens vous avez raison, puisqu'il faut envisager les moyens de votre cliente pour contester le texte, il faut aborder la recevabilité du recours en excès de pouvoir devant le juge administratif, puisque dans l'hypothèse où les conditions de recevabilité ne sont pas remplies, la requête est vouée à l'échec.
1- Pour ce qui est d'une circulaire, en effet, vous avez raison, il faut se poser la question de savoir si elle est un acte susceptible de recours devant le juge administratif = c'est une condition de recevabilité
Et le critère de distinction qui a cours aujourd'hui est celle de la JSP du CE "Mme Duvignères" de 2002 selon laquelle les dispositions à caractère impératif et général d'une circulaire sont attaquables, à l'inverse ses dispositions à caractère non impératif sont insusceptibles de recours. (n'a plus cours la distinction entre circulaire interprétative et règlementaire opérée par la JSP du CE "Notre Dame du Kreisker" de 1954.
Il vous faut donc lire votre énoncé pour déterminer si la circulaire en cause à un caractère impératif ou non. Pour rappel :
- La circulaire non impérative est une circulaire, au vrai sens du terme, c'est-à-dire qui donne aux agents des recommandations sur la manière d'agir et d'interpréter un texte - c'est un outil du pouvoir hiérarchique - les administrés ne sont pas ses destinataires.
- La circulaire impérative est celle qui, en raison des termes employés par son auteur, prescrit aux agents qui en sont destinataires lesquels sont alors tenus de l'appliquer, soit qu'elle créé une règle de droit nouvelle soit qu'elle interprète une règle de droit ;
La circulaire impérative est illégale dans 3 cas :
* soit elle fixe, dans le silence des textes, une règle nouvelle illégale (et c'est souvent le cas car en général les auteurs d'une circulaire sont les ministres alors que le pouvoir règlementaire appartient en principe au 1er ministre ; autrement dit là l'illégalité tient à l'incompétence de l'auteur de la circulaire ; il peut y avoir une illégalité interne par exemple la circulaire est inconventionnelle )
* soit elle méconnait le sens et la portée des dispositions législatives ou réglementaires qu'elle entendait mettre en œuvre ou expliciter,
* soit elle réitère une règle contraire à une norme juridique supérieure
2- Il faut envisager les autres conditions de recevabilité :
- délai de recours : vous avez raison à ceci près que, pour que le délai de recours soit opposable à l'encontre d'une circulaire, encore faut-il qu'elle ait été régulièrement publiée (cf L. 312-2 du code des relations entre le public et l'administration) ;
Il y a d'autres conditions de recevabilité notamment la qualité donnant intérêt pour agir de votre cliente.
3- Pensez peut être à d'autres voies de recours , je pense notamment aux référés (si cela correspond à votre programme)...
3- Concernant l'exception d'illégalité, je ne vois pas bien dans quelle mesure ce moyen intervient dans votre cas : c'est dans le cas où le délai de recours aurait expiré et que vous conseillez à votre client de faire une demande d'abrogation de la circulaire, d'attaquer ensuite un éventuel refus de la demande et d'exciper, à l'occasion de ce recours, de l'illégalité de la circulaire ? Dans ce cas, de la même manière, la question du caractère impératif ou non de la circulaire pose question (puisque l'obligation d'abrogation qui pèse sur l'administration ne vaut que pour les actes de nature règlementaire et illégaux - JSP Alitalia repris au CRPA).
J'espère que tout ceci pourra vous aider.