L'autorité de la chose jugée des décisions du Conseil C.

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Pour la semaine dernière, nous avions un exposé à rendre, qui s’intitulait « Existe-t-il une autorité de la chose jugée des décisions du CC ? », sujet que nous devions d’abord traiter une première fois à l’oral, puis rendre par écrit pour la semaine suivante (pour ce vendredi, en somme). Je dois avouer que je crois être tombé sur le sujet le plus complexe de ma jeune carrière de juriste; pendant les deux semaines avant l’exposé, nous avons travaillé comme des dingues, lu de la doctrine, mais ne sommes pas parvenu à obtenir un plan satisfaisant. Nous avons fait ceci :

I- L’affirmation progressive d’une autorité de la chose jugée des décisions du Conseil Constitutionnel

A- La Consécration prétorienne par le Conseil constitutionnel de l’autorité de chose jugée de ses propres décisions.

B- la réception des DC par leurs destinataires : une diligence accrue

II- Une autorité de la chose jugée à géométrie variable

C. Le respect de l’autorité de la chose jugée soumis à la bonne volonté de ses destinataires

B- La possibilité du renouvellement du procès de la loi : la confirmation d’une autorité de la chose décidée des décisions du Conseil constitutionnel.

Naturellement, nous nous sommes fait démonter à l’oral, et la prof nous a dit que notre plan ne tenait pas. J’avoue que je ne sais pas du tout quel plan adopter, dans la mesure où il nous a été clairement dit que
- nous ne prenions pas suffisamment en compte la QPC
- Nous ne parlions pas assez de l’étendu de l’autorité de la chose jugée.

Nous pensons actuellement à un plan en I- autorité de la chose jugée perfectible a priori II- renforcée a posteriori, mais là encore, ça ne semble pas tellement tenir debout… Nous sommes vraiment dans l’impasse; si l’un d’entre vous pouvait nous filer un coup de main, j’apprécierais vraiment.

Merci par avance !

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Camille Intervenant

Bonjour,
Sujet effectivement un peu épineux...

Une chose est certaine...
- nous ne prenions pas suffisamment en compte la QPC
- Nous ne parlions pas assez de l’étendu de l’autorité de la chose jugée.

Jamais entendu parler ni lu nulle part (notamment sur les pages très bien documentées sur la QPC sur le site même du "ConsCons") qu'on pouvait contester/faire appel de la décision prise par celui-ci à l'occasion d'une QPC.
Ce n'est d'ailleurs pas écrit dans le corps même des décisions.
Il est, au contraire, plutôt écrit :
Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.

(extrait d'une décision sur QPC récente et médiatisée d'une certaine Marine X... au sujet de la publication de certains "noms et qualités" de certains "citoyens"...)
Décision publiée au JO alors qu'elle serait encore contestable ?
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Et dans l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, revue et corrigée pour tenir compte de cette histoire de QPC, rien lu non plus.
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Hors Concours

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Bonjour Camille, merci d'avoir pris le temps de me répondre.

En fait, d’après les quelques textes de doctrine que j’ai pu lire ça et là, l’autorité de la chose jugée des décisions du Conseil est renforcée en QPC : le Conseil effectuerait un contrôle « intégral » de la loi pour lui conférer un « brevet de constitutionnalité » qui ne pourrait être remis en cause qu’en cas de changement de circonstances alors que dans le cadre du contentieux a priori ce fameux « brevet de constitutionnalité » a été plus ou moins abandonné. Ainsi, pour certains auteurs, on en arriverait à un nouvel équilibre entre les décisions a priori et a posteriori : dans le contentieux a priori, le conseil se contenterait d’effectuer un contrôle « temporaire », restreint de la loi déférée et ne pas la contrôler « intégralement « , laissant ainsi la possibilité pour la loi d’être contestée à nouveau en QPC. Et en QPC, le contrôle effectué serait intégral, et l’autorité de la chose jugée serait pleine et entière : a chaque examen QPC, le Conseil se prononce sur sur la loi eu égard aux droits et libertés que la C° garantit.

En outre, la procédure même de la QPC renforcerait l’autorité des décisions du conseil à l’égard des autres juridictions dans la mesure où celles-ci, pour transmettre la QPC, sont obligées de se référer expressément et explicitement aux décisions du Conseil et donc tenir compte, dans toute son ampleur, de l’autorité de la chose jugée : elles ne pourraient plus se cacher (ou alors si peu) derrière leur « souveraineté d’appréciation ». On assisterait alors à une spécialisation des juges (Juges ordinaires : souveraineté d’appréciation de la loi/ CC : souveraineté d’appréciation de la C°) et à un dialogue des juges à l’échelle nationale : cet élément permettrait de conclure qu’on a de plus en plus affaire à une véritable « Cour Constitutionnelle ».

Je viens de me rendre compte à la lecture que ces deux séries d’arguments feraient une bonne 2ème partie… Qu’en pensez-vous ?

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Yn Membre VIP

Salut,

Je trouvais que le premier plan se défendait bien, mais beaucoup de chargés de TD veulent exactement le plan qu'ils ont imaginé.

Je pense qu'orienter ta réflexion sur l'axe suivante : l'autorité de la chose jugée est relative pour le Conseil constitutionnel mais que celle-ci tend à augmenter (I), et que la QPC peut potentiellement augmenter l'intensité de celle-ci (II).

Pense à aller voir la position de la Cour de cassation qui est plutôt réticente au circuit de la QPC pour tempérer tes précédents arguments.

Un petit tour du côté du régime de l'ACJ pour son côté positif et négatif, je pense qu'il y a des choses intéressantes à dire là-dessus.

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« Je persiste et je signe ! »

Docteur en droit, Université Paris-1 Panthéon-Sorbonne.

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Camille Intervenant

Bonjour,

Ainsi, pour certains auteurs, on en arriverait à un nouvel équilibre entre les décisions a priori et a posteriori : dans le contentieux a priori, le conseil se contenterait d’effectuer un contrôle « temporaire », restreint de la loi déférée et ne pas la contrôler « intégralement « , laissant ainsi la possibilité pour la loi d’être contestée à nouveau en QPC.


Et en QPC, le contrôle effectué serait intégral, et l’autorité de la chose jugée serait pleine et entière : a chaque examen QPC, le Conseil se prononce sur sur la loi eu égard aux droits et libertés que la C° garantit.

Vu comme ça, ce n'est pas faux. A un détail près.
Le Conseil "ne se contente pas de...", il fait comme il peut, sur la base de considérations générales à un moment où, par définition, le texte n'a pas encore eu à s'appliquer.
De plus, ce "premier examen" n'est pas purement automatique.
Le CC ne contrôle pas systématiquement toute la production stakhanoviste du parlement...

En QPC, le contrôle n'est pas plus "intégral" mais il y a examen ou "nouvel examen" à l'occasion d'un "cas pratique".
Ce qui peut changer beaucoup de choses dans le mécanisme de l'examen. A rapprocher du discours de Portalis sur les rôles respectif des législateurs et des juges.

Et petit rappel, le CC ne vérifie que la conformité à la Constitution et rien d'autre.

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Hors Concours