Nullité et contrats à exécution successive

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bonjour à tous les juristudiants et les juristudiantines ^^
une rapide petite mise en bouche avant de poser ma question:
alors voilà, quand un contrat à exécution successive comme un contrat de travail ou de bail est annulé, la nature de l'obligation empêche d'un point de vue pratique le retour au statut quo ante, je m'explique:
dans le contrat de travail par exemple, l'employé pourrait certes restituer les rémunérations qu'il a perçues en vertu du contrat nul, mais en revanche l'employeur ne peut restituer l'obligation de l'employé de fournir une prestation quotidienne dans le cadre de son travail.
Donc une exception est faite au principe du retour au statut quo ante, mais pour éviter l'enrichissement de la partie dont on peut répéter l'obligation mais qui ne peut en revanche répéter l'obligation de son contractant, le juge le condamne à verser une indemnité.

Ma question est la suivante: dans un contrat de travail annulé, donc, l'employeur est obligé de verser cette indemnité à l'employé justement car il ne peut répéter l'obligation de l'employé, mais cet employé justement est-ce qu'il doit répéter l'obligation de son cocontractant autrement dit restituer les rémunérations qu'il a perçues ?
je pense que oui parce que si tel n'était pas le cas alors l'indemnité versée par l'employeur conduirait paradoxalement à enrichir la partie dont on ne peut répéter l'obligation

d'avance merci

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Bonjour,

Pour ma part je n'ai pas du tout compris ça comme ça.
Pour moi un contrat de travail est un contrat à exécution successive, en cas d'annulation il n'y a pas de rétroactivité car il est impossible de restituer le travail fourni, en conséquence je ne vois pas pourquoi on restituerait les salaires perçus. La nullité commence une fois prononcée, on ne peut pas replacer les parties comme au premier jour, ainsi il n'y a pas d'enrichissement. Pour les indemnités il faut voir qui est en faute c'est différent.

( à confirmer bien sûr, je viens justement de voir ça récemment j'ai peut être mal compris aussi ! )

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Je pense que c'est à cause de ton exemple, qui concerne le droit du travail. C'est une matière un peu différente du droit civil.

Si tu prends un CDD, qui doit répondre à des conditions de forme précises ( un écrit disons ) : en l'absence d'écrit, donc non respect d'une condition de forme, le contrat n'est pas nul mais requalifié en CDI.

Maintenant, de manière un peu plus générale, il s'agit de déterminer quel effet donner à un contrat à exécution successive qui a connu un commencement d'exécution, si je te suis. En principe, comme tu le soulèves, il est difficile de restituer une prestation. Il y a un arrêt de la chambre sociale, rendu en 1980 ( 3 octobre ), qui considère d'ailleurs que la nullité entraîne l'indemnisation des parties et non la restitution ( lettres capitales de Légifrance ) :

MAIS ATTENDU, QUE LORSQU'EN CAS DE NULLITE DE CONTRAT A EXECUTION SUCCESSIVE LES PARTIES NE PEUVENT ETRE REPLACEES DANS LEUR SITUATION ANTERIEURE, ELLES DOIVENT ETRE INDEMNISEES DES PRESTATIONS FOURNI ES, AINSI QUE DES CONSEQUENCES DES FAUTES COMMISES PAR L'UNE AU PREJUDICE DE L'AU TRE, QUE LA COUR D'APPEL A ESTIME A BON DROIT QUE GUIRAT, QUI AVAIT COMMIS UNE INFRACTION A LA LOI PENALE ET QUI AVAIT BENEFICIE DU TRAVAIL D'ABDELAZIZ, IRREGULIEREMENT EMBAUCHE PAR LUI, DEVAIT, NONOBSTANT LA NULLITE DU CONTRAT DE TRAVAIL L'INDEMNISER DU TRAVAIL FOURNI ET DU PREJUDICE SUBI PAR LUI ;

Certains auteurs le voyaient un peu comme la traduction d'une situation de fait : juridiquement ce n'était pas le salaire que l'employé gardait, mais une indemnité, et c'était la même chose pour le contrat de bail.

Après, on a admis directement que le salarié dont le contrat avait été annulé ( contrat de travail clandestin, 26 janvier 1983 ) avait le droit de conserver son salaire, sans que ce soit une indemnité :


" Mais attendu que les juges du fond, ont relevé que Miled, ayant fait venir de Tunisie son compatriote Nabil, non titulaire d'une carte de travailleur étranger, pour assurer la gestion de son épicerie, avait au bout de huit mois mis fin à cette activité; qu'appréciant l'ensemble des éléments qui leur étaient fournis, tant sur la durée des services accomplis par Miled que sur les acomptes et avantages en nature allégués, ils ont estimé que nonobstant la nullité du contrat de travail, les parties ne pouvant être remises dans leur état antérieur, Nabil était fondé à réclamer à Miled le paiement des salaires et indemnités qui lui étaient dûs en raison de son travail et du préjudice à lui causé par la rupture par l'employeur des relations de travail, ainsi que les fiches de paye et un certificat de travail; qu'ils ont ainsi légalement justifié leur décision "

C'est assez logique, dans la mesure où l'employeur a donné un salaire et a profité du travail fourni, et le salarié a donné du travail et a profité d'un salaire. Le travail ne peut pas être restitué, donc l'employeur est tenu de verser la valeur correspondant à l'exécution de ce travail, et les salaires antérieurs n'ont pas à être restitués puisqu'ils correspondent à un travail effectif. C'est un peu comme si au lieu de procéder à deux mouvements de fonds on considérait que les salaires correspondent à l'indemnité, sachant que les juges ne sont pas liés par les sommes prévues au contrat. En ce sens, il n'y a pas d'enrichissement.

Enfin c'est ainsi que je le comprends.

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Camille Intervenant

Bonjour,
Attendez voir... Si on parle [u:2aa98bv6]annulation[/u:2aa98bv6] (et non pas résiliation), c'est qu'on peut supposer qu'il n'y a pas eu travail effectif.
Donc salaires touchés indûment...
Et donc tout dépend de ce que recouvre l'annulation : contrat illégal ou contrat fictif.

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Hors Concours

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En ce qui concerne les contrats de travail je suis de l'avis de Kath.

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Ezekiel 25:17"La marche du vertueux est semée d'obstacles qui sont les entreprises égoïstes que fait sans fin surgir l'oeuvre du Malin. Bénit soit-il l'homme de bonne volonté qui au nom de la charité se fait le berger des faibles qu'il guide dans la vallée d'ombre de la mort et des larmes"

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Citation de Camille :

Bonjour,
Attendez voir... Si on parle [u:jsbvy10w]annulation[/u:jsbvy10w] (et non pas résiliation), c'est qu'on peut supposer qu'il n'y a pas eu travail effectif.
Donc salaires touchés indûment...
Et donc tout dépend de ce que recouvre l'annulation : contrat illégal ou contrat fictif.

Oui, il y a deux possibilités. Dans un cas de commencement d'exécution ( c'est le cas soulevé par les cours de droit des obligations et RGO sur l'annulation de contrats à exécution successive ), il y a eu une exécution même sommaire : dans le cas de la partie qui ne peut répéter l'obligation de son contractant, il y a eu occupation du local ou travail réel, et c'est ce problème précis qui a occupé les juges.

La résiliation concerne la mauvaise exécution d'un contrat. L'annulation, un défaut dans les conditions de formation, même si le contrat s'est poursuivi durant un certain temps. S'il y a annulation dans un contrat à exécution successive, ce sera pour erreur, violence ( c'est assez rare, encore qu'en droit du travail il peut y avoir mensonge sur les diplômes et capacités ), défaut de capacité, cause ou objet illicite ou immoral(e), parce que durant le commencement d'exécution, l'une des parties se sera rendue compte que les conditions de formation ne sont pas valides.

Ensuite, on peut se placer de l'autre côté, dans le cas de la partie qui peut répéter l'obligation de son contractant, donc reverser les sommes perçues indûment. Dans le cas d'un commencement d'exécution, les sommes n'étaient pas indues ( sans cause ) puisqu'il y avait un contrat à la base et qu'il avait commencé à être appliqué. Hors commencement d'exécution, par exemple si le salarié n'exécute pas ses obligations mais encaisse gaillardement les salaires, on se placera plus dans la sanction de l'inexécution que dans la sanction de la formation du contrat. En pratique en droit du travail on rompt le contrat plutôt que de l'annuler.

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