Pointage et temps de travail

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Bonjour,
on me demande de refaire mon examen blanc pour mercredi et d'incorper dans mon commentaire pas moins de 15 auteurs; pouvez vous m'aider?
J'ai déjà Dockès, Waquet et Ray
Je reviendrais sur le site pour y ajouter mes recherches au fur et à mesure.
Il s'agit de commenter la décision suivante:







[u:17etnsmd]13 juillet 2004, Cour de cassation, Société Carrefour France contre Union des syndicats CGT et a.[/u:17etnsmd]

Vu le principe fondamental de la liberté d'entreprendre et l'article L. 212-4 du Code du travail ;


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que l'implantation des pointeuses dans les magasins de la société Carrefour de Vénissieux et d'Ecully, de par leur éloignement des vestiaires et des salles de pause, imposant aux salariés des temps de déplacement qui ne sont pas décomptés comme temps de travail effectif, l'Union des syndicats CGT des personnels du commerce de la distribution et des services du Rhône, l'Union locale des syndicats CGT des 5e et 9e arrondissements de Lyon et l'Union locale CGT de Vénissieux, Saint-Fons, Feyzin ont saisi le tribunal de grande instance aux fins de voir enjoindre à la société Carrefour de modifier l'implantation de ses appareils de pointage ;


Attendu que pour accueillir la demande des syndicats, la cour d'appel énonce que l'éloignement entre les pointeuses et les vestiaires ou les salles de repos oblige certains salariés à se déplacer en tenue de travail à l'intérieur du magasin pendant un temps qui soit n'est pas comptabilisé comme temps de travail (trajet entre vestiaire et pointeuse) soit s'impute sur le temps de pause (trajet entre pointeuse et salle de repos) ; qu'ayant revêtu la tenue de travail, les salariés doivent se conformer aux directives de l'employeur et aller pointer sur la machine déterminée par l'entreprise de telle sorte que le temps de déplacement à l'intérieur du magasin est la conséquence de l'organisation imposée par ce dernier ; que le tribunal en a justement déduit que les dispositions de l'article L. 212-4 du Code du travail imposaient d'implanter les appareils de pointage à proximité immédiate des vestiaires du personnel ; que pour autant celui-ci ne s'est pas substitué à l'employeur auquel incombe le choix des mesures appropriées pour que ces dispositions soient satisfaites ;




Qu'en statuant ainsi, alors que si la cour d'appel, qui a relevé que lors des déplacements litigieux, les salariés étaient à la disposition de l'employeur, tenus de se conformer à ses directives, en a déduit à bon droit que ces périodes constituaient un temps de travail effectif, elle ne pouvait pour autant imposer à l'employeur la modification de l'implantation des appareils de pointage sans porter atteinte à son pouvoir de direction et a ainsi violé le principe et le texte susvisés ;


PAR CES MOTIFS :


CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 mars 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;

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Je vous livre le plan que j'avais imaginé pour cette décision à l'examen blanc:


[u:3y6tei0y]I Un éclaircissement certain quant à la nature juridique des déplacements en cause[/u:3y6tei0y]
A) Une application stricte de la définition du travail effectif
B) La violation caractérisée de l’article L212-4

[u:3y6tei0y]II Une sacralisation discutable du pouvoir de direction de l’employeur [/u:3y6tei0y]

A) Une motivation discutable
B) Vers un renouveau de la théorie de l’employeur seul juge

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Bonjour,

Tu recherches des auteurs qui ont commenté la décision ou des profs de droit du travail qui peuvent avoir traité le sujet abordé dans leur bouquin?

Je vois que tu évoques emmanuel DOCKES mon ancien prof de droit du travail à la faculté de droit de Dijon.

Bon courage

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Master Carrières judiciaires et sciences criminelles

Institut d'Etudes Judiciaires de Dijon

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Re,

Important:
L'article l212-4 du code du travail est modifié par l'ordonnance 2007-329 2007-03-12 art. 14 : Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur en même temps que la partie réglementaire du nouveau code du travail et au plus tard le 1er mars 2008.


Voici les auteurs du Précis Dalloz, Droit du Travail: Jean Pélissier est professeur émérite à l'Université des sciences sociales de Toulouse. Alain Supiot est professeur à l'Université de Nantes. Antoine Jeammaud est professeur à l'Institut d'études du travail de Lyon (Université Lyon 2).

Je pense que le sujet de ton commentaire est évoqué dans ce manuel.

Bon courage

__________________________
Master Carrières judiciaires et sciences criminelles

Institut d'Etudes Judiciaires de Dijon

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Merci Tony pour l'info; je n'avais pas vu cette ordonnance en effet, je vais aller voir de quoi il s'agit.

Pour le précis, il n'y a pas grand chose dedans mais j'ai trouvé d'autres choses à dire; je pense que je peux parler du temps contraint d'une facon générale, et donc intégrer les astreintes, et pourquoi pas parler du temps de trajet: peut il etre assimilé à ce temps de déplacement?

Au passage, je me suis trompée dans mon plan, le plan que j'ai donné à l'exam est le suivant:

[u:2m6cn84q]I Un éclaircissement certain quant à la nature juridique des déplacements en cause[/u:2m6cn84q]
A) Une application stricte des dispositions de l’article L212-4
B) La vocation généralisante de cette solution d’espèce

[u:2m6cn84q]II Une sacralisation discutable du pouvoir de direction de l’employeur [/u:2m6cn84q]
A) Une motivation discutable
B) Vers un regain d’intérêt de la théorie de l’employeur seul juge

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Camille Intervenant

Bonjour,

Citation de fayevalentine :


[u:23kkio43]II Une sacralisation discutable du pouvoir de direction de l’employeur [/u:23kkio43]

A) Une motivation discutable
B) Vers un renouveau de la théorie de l’employeur seul juge


Sauf que, moi, je n'ai pas tout à fait compris la même chose...
Citation de Arrêt :



Attendu
que pour accueillir la demande des syndicats, la cour d'appel énonce... ;

que le tribunal en a justement déduit que ... ;

que pour autant celui-ci ne s'est pas substitué à l'employeur auquel incombe le choix des mesures appropriées pour que ces dispositions soient satisfaites

Qu'en statuant ainsi,
alors que si la cour d'appel
...
en a déduit à bon droit que ces périodes constituaient un temps de travail effectif,
elle ne pouvait pour autant imposer à l'employeur la modification de l'implantation des appareils de pointage sans porter atteinte à son pouvoir de direction
et a ainsi violé le principe et le texte susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions


Moi, j'ai plutôt l'impression que ce que la cour de cassation reproche à la cour d'appel, c'est justement de ne pas s'être substituée à l'employeur et ne pas lui avoir imposé la modification de l'implantation, non ?
Pour le reste, la cour de cassation donne bien raison à la cour d'appel mais lui reproche de ne pas en avoir tiré les conséquences qui s'imposaient, il me semble.

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Bonjour Camille,

Je pense que la Cour de cassation a entendu appliquer la liberté d'entreprendre aux conditions de travail, en permettant à l'employeur de déterminer l'implantation des appareils de pointage. La Cour reproche donc aux juges du fond de s'etre substitué à l'employeur qui dispose du pouvoir de direction. Et cette solution apparait souhaitable: une solution inverse aurait permis de contester tout un tas de choses (les mesures d'organisation prises par le chef d'entreprise par exemple, l'emplacement des postes de travail etc).

J'ai parlé plus haut du temps de trajet et c'était stupide parce que celui ci ne constitue pas en soi un temps de trajet effectif, donc ca serait difficile à caser en l'espèce...
Mais on pourrait retenir la vision communauatire du temps de trajet, qui, je crois, retient que le temps de trajet est du temps de travail effectif (puisqu'il exclu un temps du troisième type et adopte une vision large de la notion de travail effectif, dans un objectif de protection toujours accrue de la santé et de la sécurité des travailleurs).

Bref, j'essaie de caser un maximum de choses pour avoir un maximum d'auteurs à citer, comme on me l'a demandé...

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Camille Intervenant

Bonjour,

Citation de fayevalentine :

Bonjour Camille,

Je pense que la Cour de cassation a entendu appliquer la liberté d'entreprendre aux conditions de travail, en permettant à l'employeur de déterminer l'implantation des appareils de pointage. La Cour reproche donc aux juges du fond de s'etre substitué à l'employeur qui dispose du pouvoir de direction. Et cette solution apparait souhaitable: une solution inverse aurait permis de contester tout un tas de choses (les mesures d'organisation prises par le chef d'entreprise par exemple, l'emplacement des postes de travail etc).

Exact, exact, c'est moi qui ai "raté une marche".
A l'origine, le TGI a effectivement condamné l'employeur à déplacer ses pointeuses
Citation :


Par jugement du 24 avril 2001, le Tribunal de Grande Instance de LYON a : - ordonné à la Société CARREFOUR FRANCE de modifier sans délai l'implantation de ses appareils de pointage et de les installer à proximité immédiate des vestiaires du personnel,

Jugement confirmé par la cour d'appel qui précise
Citation :


Que pour autant, le tribunal ne s'est pas substitué à l'employeur auquel incombe le choix des mesures précises appropriées pour que ces dispositions soient satisfaites ;

alors que c'est ce qu'il a fait, à tort, dit la cour de cassation.
Faut-il comprendre que le tribunal devait imposer la modification de l'implantation pour qu'elle réponde au L212-4 du CT mais sans lui imposer l'installation à proximité immédiate des vestiaires ?

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Bonsoir,

Citation :

Que pour autant, le tribunal ne s'est pas substitué à l'employeur auquel incombe le choix des mesures précises appropriées pour que ces dispositions soient satisfaites ;


alors que c'est ce qu'il a fait, à tort, dit la cour de cassation.
Faut-il comprendre que le tribunal devait imposer la modification de l'implantation pour qu'elle réponde au L212-4 du CT mais sans lui imposer l'installation à proximité immédiate des vestiaires ?


je crois que vous commentez ici la décision de la Cour d'appel;
or ce n'est pas du tout ce que dit la Cour de cassation;

pour la cour de cassation, les juges du fond n'avaient même pas à ordonner la modification de l'implantation des pointeuses, fusse t-il à proximité des salles de repos.
L'employeur, qui dispose, seul, du pouvoir de gestion dans son entreprise, pouvait très bien, par exemple, abandonner le système des pointeuses et dès lors le problème était réglé; quoi qu'il en soit, les juges n'avaient pas à intervenir; ils devaient s'en tenir à requalifier le temps de déplacement en temps de travail effectif et il faut y voir là l'essentiel pour les salariés (même si ils demandaient le déplacement des pointeuses et non la requalification en temps de travail effectif).

En effet, aucune règle n'impose, pour que soit effectivement pris en compte ce temps dans le calcul du temps de travail, le déplacement des pointeuses.

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Camille Intervenant

Bonjour,

Citation de fayevalentine :


je crois que vous commentez ici la décision de la Cour d'appel;
or ce n'est pas du tout ce que dit la Cour de cassation;

Exact, j'essayais de savoir comment la cour d'appel aurait dû statuer pour ne pas encourir les foudres de la cassation.

Citation de fayevalentine :


pour la cour de cassation, les juges du fond n'avaient même pas à ordonner la modification de l'implantation des pointeuses, fusse t-il à proximité des salles de repos.
L'employeur, qui dispose, seul, du pouvoir de gestion dans son entreprise, pouvait très bien, par exemple, abandonner le système des pointeuses et dès lors le problème était réglé; quoi qu'il en soit, les juges n'avaient pas à intervenir; ils devaient s'en tenir à requalifier le temps de déplacement en temps de travail effectif et il faut y voir là l'essentiel pour les salariés (même si ils demandaient le déplacement des pointeuses et non la requalification en temps de travail effectif).

En effet, aucune règle n'impose, pour que soit effectivement pris en compte ce temps dans le calcul du temps de travail, le déplacement des pointeuses.

Exact, c'était probablement la bonne solution.
Il aurait été intéressant de pouvoir lire le dispositif de la 2ème cour d'appel.

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Bonjour,

oui, ce serait intéressant et je vous avoue que je n'ai jamais pensé à aller voir une décision de renvoi; je suis allée sur legifrance mais je n'ai pas trouvé la décision: soit je ne sais pas chercher, soit la cour n'a pas encore statué(apparement, la cour de cassation a renvoyé devant la cour d'appel de Chambéry). A suivre, donc.

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Camille Intervenant

Bonjour,
C'est en fait que Legifrance ne publie pas tous les arrêts de cours d'appel. On peut même dire qu'il en publie assez peu. Evidemment, par rapport aux arrêts de cassation, ce serait un travail de romains, avec une portée en moyenne moins intéressante.

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oui, vous avez raison; n'y a t-il alors aucun moyen d'accéder à ce type de décision?
C'est intéressant de suivre une procédure de A à Z...

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Camille Intervenant

Bonjour,
Voir peut-être avec le greffe du tribunal ?



Sinon, toujours sur Légifrance, si le 2ème arrêt est reparti en cassation... :)) 8)

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Bonjour,
je viens d'avoir la correction de mon examen sur cet arrêt; les chargés de TD ont décidés de faire leur plan autour de la notion de pouvoir de direction:
I Un pouvoir de direction légitimé
II Un pouvoir de direction limité

C'est un très beau plan, surtout quand on sait que notre professeur de droit des conditions du travail apprécie particulèrement cette notion de pouvoir de direction de l'employeur...