Préjudice personnel et "organismes sociaux"

Publié par

Bonjour !

Petite question sur quelque chose que je ne comprend pas dans un arrêt ; Cassation, 2ème Civ., 12 mai 2005 (04-14-018)

Cependant, ce n'est pas tant le fond de l'affaire que ses conséquences qui m'échappent ; c'est peut-être purement procédurale, mais je ne comprend pas vraiment ce que signifie le dernier considérant : "Considérant que le [le préjudice sexuel] revêt un caractère personnel, comme tel exclu du recours des organismes sociaux"

Qu'est-ce donc que ces organismes sociaux ? Et que se passe-t-il donc quand le préjudice n'est pas "personnel" ?

Ca a l'air d'être un point de détail mais... mais ça me parait important de comprendre même les détails =)

Merci beaucoup d'avance !

Amy

Publié par

Bonsoir,

Pour évacuer la première difficulté, le terme "organismes sociaux" désigne les organismes de sécurité sociale au sens large (CAF, CPAM, CARSAT...).

Ce que je comprend de l'arrêt, même si il est très succinct et devrait donc être mis en relation avec l'arrêt rendu par la Cour d'appel, voir le jugement du TASS, est assez simple.

En réalité, lorsque vous subissez un dommage découlant d'un accident de droit commun (c'est-à-dire sans lien avec le travail), que vous pouvez justifier des conditions d'ouvertures nécessaires en terme de cotisation et de durée d'affiliation principalement, vous pouvez prétendre à des prestations sociales venant le réparer pour partie. Comme le taux d'incapacité totale de travail causé à la victime est ici de 75%, il aurait le droit à une rente.

La problématique étant que cette rente vient en réparation des conséquences économiques du risque social survenu et subi par la victime (un accident de la circulation ici apparemment), en clair la perte de gain qui en découlera pour l'assuré, ce dernier ne pouvant plus travailler comme avant, que ce soit en horaire ou sur le même poste, et donc subira bien une perte de salaire de ce fait.

Ainsi, ce que censure la Cour de cassation, est le fait pour la Cour d'appel, suivant certainement le TASS sur ce point, d'inclure dans l'évaluation de cette incapacité le préjudice sexuel subi par l'assuré social, ce qui n'est pas une conséquence économique.

En faisant cela, la Cour mettait donc à la charge de l'organisme de sécurité sociale débiteur de la rente, la réparation d'un préjudice que celle-ci n'est pas censé réparer et le privant donc de l'efficacité d'un éventuel recours récursoire contre le responsable du dommage, puisque ce recours ne couvre encore une fois que les préjudices "économiques" (perte de salaire), et non ce que la Cour de cassation qualifie de préjudice personnel, c'est-à-dire le préjudice sexuel en l'espèce.

Finalement, cela reviendrait à faire peser, au moins pour partie, la charge finale de la dette de réparation sur une personne autre que le responsable, ce qui n'est pas admissible, car contraire à la conception de la responsabilité civile telle qu'édictée par le Code civil.

En clair, la Cour de cassation exclut de l'assiette des préjudices pouvant être pris en compte, préjudices servant de base au calcul des prestations sociales donc et qui seront servis à l'assuré, les préjudices "personnels", puisque ce n'était pas la vocation, pour ce cas particulier, des organismes de sécurité social de réparer ce type de préjudice et en ce que cela conduirait à la situation développée plus haut.

Publié par
marianne76 Modérateur

Bonjour
Avant le nomenclature Dintilhac les juges distinguaient entre le personnel subjectif et personnel non soumis à emprise des organismes sociaux et les préjudices objectifs soumis au recours des organismes sociaux . Les sommes allouées à ce titre constituaient une enveloppe globale dans laquelle les organismes sociaux pouvaient puiser pour se faire rembourser de leur débours. Le préjudice sexuel étant un préjudice personnel les organismes sociaux ne pouvaient pas prétendre à le ponctionner. Le problème de cette façon de faire c'est que l'IPP était intégrée dans le préjudice corporel objectif et soumis à emprise de la sécurité sociale. Celle ci pouvait donc se servir sur un poste de préjudice qu'elle ne réparait pas ce qui est très contestable. La victime pouvait voir son indemnisation largement imputée notamment en cas de partage de responsabilité. Actuellement cette distinction entre préjudice personnel soumis à emprise et préjudice non soumis à emprise n'existe plus. Désormais plus d'enveloppe globale : le recours se fait poste par poste et l'organisme ne peut exercer un recours que sur les postes qu'il a indemnisés .

__________________________
Merci de lire et de respecter la charte du forum http://www.juristudiant.com/forum/charte-de-bonne-conduite-a-lire-avant-de-poster-t11.html

Publié par

Bonjour,

Alors si j'ai bien compris, l'organisme social mentionné est celui qui va payer une rente, ou en tout cas compenser le préjudice économique subi, dommage qui, selon l'ancienne nomenclature, était dit objectif ; par contre, le préjudice sexuel étant personnel à la victime, ça serait au responsable de l'accident de l'indemniser.

Sur le coup, je comprend, mais quid du responsable concernant le dommage objectif ? Si c'est un organisme social qui paie, cela signifie que lui il ne va pas compenser la victime lui-même sur ce plan ? Ou bien les organismes sociaux se retourneront contre lui concernant les sommes qu'ils auront payé ?

Merci de vos réponses,

Amy

Publié par
marianne76 Modérateur

Lors d'un accident qui ne serait pas un accident du travail, la CPAM ne verse pas de rente , ses débours sont les frais d'hospitalisation , frais médicaux pharmaceutiques éventuellement le salaire qu'elle a pu verser
Le responsable est condamné pour le tout aussi bien préjudice objectif que subjectif. Le préjudice objectif constituait l'enveloppe globale dans laquelle la CPAM pouvait puiser. La victime doit donc intégrer dans ses demandes les débours de la sécurité sociale

__________________________
Merci de lire et de respecter la charte du forum http://www.juristudiant.com/forum/charte-de-bonne-conduite-a-lire-avant-de-poster-t11.html

Publié par
joaquin Modérateur

Et si justement c'était un accident de travail : La CPAM paye une partie du préjudice (objectif ?). Est-ce que le responsable de l'accident doit payer l'autre partie du préjudice (sujectif : sexuel par exemple). Comment cela se passe en pratique ?

__________________________
Joaquin Gonzalez

Master 1 en droit des affaires

Conseil d'entreprise



Avant de poster, lire la charte du forum :


http://www.juristudiant.com/forum/charte-de-bonne-conduite-a-lire-avant-de-poster-t11.html

Publié par
marianne76 Modérateur

L'indemnisation ne se fait pas de la même façon,je vous renvoie à ce que dit la cour de cassation " le versement de l’indemnisation est confié aux Caisses primaires d’assurance maladie, qui récupèrent frais médicaux, indemnités journalières et rentes d’incapacité permanente sur les entreprises au moyen de cotisations, dont le montant est pour partie fonction des dépenses consécutives aux accidents et maladies professionnelles survenues dans chaque établissement. En cas de faute inexcusable de l’employeur, la caisse verse la ou les rentes majorées, récupérées sous forme de cotisations supplémentaires, et les indemnités réparant les préjudices personnels, récupérées directement sur l’employeur coupable. C’est aux caisses que sont adressées les déclarations d’accident du travail ou de maladies professionnelles, et ce sont elles qui reconnaissent le caractère professionnel de l’accident ou de la maladie.

Au cours de l’année 2002, la Chambre sociale a été conduite à préciser sa position, en premier lieu quant au fondement de la responsabilité de l’employeur et à la définition de sa faute inexcusable, et en second lieu, quant aux obligations incombant aux caisses primaires d’assurance maladie afin d’assurer le caractère contradictoire à l’égard de l’employeur de la procédure de reconnaissance du caractère professionnel de l’accident ou de la maladie."

__________________________
Merci de lire et de respecter la charte du forum http://www.juristudiant.com/forum/charte-de-bonne-conduite-a-lire-avant-de-poster-t11.html