Bonjour,
Je commence mon relayage de l’actualité juridique, en vous présentant un arrêt de la cour de cassation tout frais tout chaud https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/premiere_chambre_civile_568/668_15_34517.html
Dans cet arrêt, la cour de cassation a eu à se prononcer sur la prescription en matière de responsabilité du fait des produits défectueux, dans le cas particulier où le produit a été mise en circulation après l’expiration du délai de transposition de la directive 85/374/CEE du Conseil, du 25 juillet 1985, mais avant la date d’entrée en vigueur de la loi n° 98-389 du 19 mai 1998 transposant la directive.
Brève présentation des faits : En février 1998 (la date est très importante), une personne souffrant d’une rhinopharyngite fébrile s’est vu prescrire un traitement. Ce traitement lui a causé de nombreux trouble, notamment une atteinte de la muqueuse oculaire ayant conduit à une cécité. Le juge des référés a été saisi le 16 juillet 2008, par les parents de la victime, ce dernier a ordonné une expertise en vue de fixer la date de la consolidation (notion sur laquelle nous aurons l’occasion de revenir dans la suite du développement). L’expertise la fixe date de la consolidation à la fin de l’année 2005. Le 13 février 2012, les parents assignent le laboratoire producteur du médicament.
Le laboratoire oppose la prescription en se fondant sur l’article 2270-1 du code civil qui prévoit que les actions en responsabilité civile extra contractuelle se prescrivent par dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation. En effet, vu qu’on était face à un produit mis en circulation après l’expiration du délai de transposition de la directive mais avant l’entrée en vigueur de la loi, il fallait appliqué la prescription prévu à l’article 2270-1 du code civil, mais interprété à la lumière des articles 10 et 11 de la directive.
La Cour d’appel a estimé, qu’en application de l’article 2270-1 du code civil interprété à la lumière des articles 10 et 11 de la directive 85/374/CEE du Conseil, du 25 juillet 1985, le délai de prescription avait commencé à courir à compter du 13 février 1998, date de la manifestation du dommage.
La Cour de cassation casse et annule l’arrêt. Je cite «la date de la manifestation du dommage ou de son aggravation, au sens de l’article 2270-1, interprété à la lumière de la directive, doit s’entendre de celle de la consolidation, permettant seule au demandeur de mesurer l’étendue de son dommage et d’avoir ainsi connaissance de celui-ci».
La date de consolidation correspond à la date à laquelle où le dommage cesse d’évoluer. En effet, le dommage initialement subit, peut très bien s’aggraver. J’en profite pour rappeler que la jurisprudence a posé le principe selon lequel la victime n’a pas l’obligation de limiter son préjudice dans l’intérêt du responsable (à voir si le projet de réforme n’est pas revenu sur ce principe).
Pour en revenir à l’affaire, l’article 2270-1 du code civil devait être interprété à la lumière des articles 10 et 11 de la directive. L’article 10 fait courir la prescription à compter de la connaissance du dommage. La Cour d’appel avait estimé que cela correspond à la date de manifestation du dommage. La Cour de cassation ne l’entend pas de cette oreille, la connaissance du dommage ne pouvant être établit qu’à la date de consolidation.
Solution très pertinente, car l’on ne peut avoir connaissance du dommage que lorsqu’il s’est manifesté dans son entier. Lors de la manifestation du dommage, la victime a une connaissance incomplète du dommage, puisque celui-ci est susceptible d’évoluer. Il est logique faire partir la prescription à partir de la date de consolidation.
C'est d'ailleurs le principe qui ressortait de la directive, et qui ressort aujourd’hui de l'article 1386-17 du code civil. Attention aujourd’hui le délai de prescription est bien de 3ans. En l'espèce, il y avait un délai de prescription de dix ans, car on faisait application de l'article 2270-1 en raison du labs de temps entre l'expiration du délai de transposition et l'entrée en vigueur de la loi. Ce qui a pour conséquence de retenir un délai de 10 ans courant à compter de la consolidation.
Voilà !
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