Quand un vendeur commet une erreur

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Bonjour,

Je suis face à un cas qui d'apparence simple m'embrouille en fait beaucoup.
Pour résumer, un individu achète un bien dans une boutique à un prix relativement faible, et il est plus tard contacté par le gérant de cette boutique qui lui annonce qu'il y a erreur sur le prix, et lui demande de payer le prix réel (avec une remise, tout de même).
Bon. J'aurais eu tendance à considérer que l'acheteur n'avait besoin de rien rembourser, le contrat de vente a été conclu et exécuté il n'est donc plus tenu par ce dernier. L'erreur du vendeur était inexcusable. Cependant comme l'objet, et je veux dire par là le prix, n'était pas réel au moment de conclusion du contrat, il me semble tout à fait normal que le vendeur puisse en demander la nullité. En plus il accepte d'accorder une remise à l'acquéreur.
Je suis partagée entre ces deux explications et n'ose pas commencer une étude plus profonde de la situation sans être certaine de quel est le raisonnement correct.
S'il vous plait, quel est celui qui vous paraît le plus approprié?

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Yn Membre VIP

J'aurais eu tendance à considérer que l'acheteur n'avait besoin de rien rembourser, le contrat de vente a été conclu et exécuté il n'est donc plus tenu par ce dernier. .
Remets les choses dans l'ordre :

- Un contrat de vente a été réalisé entre X et Y sur un bien quelconque.
- X (vendeur) demande ensuite à Y (acheteur) de "payer à nouveau" car, selon lui, le prix n'était pas le bon.

L'erreur du vendeur était inexcusable
Ce n'est pas directement une question d'erreur excusable/inexcusable, il s'agit plus précisément d'un autre type d'erreur, je te laisse chercher.

Cependant comme l'objet, et je veux dire par là le prix, n'était pas réel au moment de conclusion du contrat, il me semble tout à fait normal que le vendeur puisse en demander la nullité. En plus il accepte d'accorder une remise à l'acquéreur.
Non, certainement pas. Sur quoi te bases-tu pour dire que "le prix n'était pas réel" ? Il y avait un prix, tu nous dis que le contrat de vente a été conclu.

Prends un exemple basique : tu achètes un portable 200€ chez Orange, deux jours plus tard, Orange te rappelle en te disant, finalement "vous devez nous donner 150€ de plus car le prix est en fait de 350€."

Selon toi, on doit annuler le contrat, Orange pourrait agir en justice pour demander la nullité ? Tu accepterais de payer à nouveau 150€ supplémentaire (?!!)

Je te laisse revoir tes premiers cours de droit des contrats, tu trouveras facilement la solution et des arguments pour comprendre qu'une telle solution n'a rien de "normale" et est totalement infondée.

Donc, ton raisonnement est incorrect : qualifie la situation (quelle est l'erreur invoquée en l'espèce ?) et détermine ensuite ce que dit le Code civil (art. 1110) et les précisions éventuellement apportées par la jurisprudence.

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« Je persiste et je signe ! »

Docteur en droit, Université Paris-1 Panthéon-Sorbonne.

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marianne76 Modérateur

Bonjour,
Un arrêt sur la question
Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du mardi 4 juillet 1995
N° de pourvoi: 93-16198

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Merci de lire et de respecter la charte du forum http://www.juristudiant.com/forum/charte-de-bonne-conduite-a-lire-avant-de-poster-t11.html

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Yn Membre VIP

Un arrêt sur la question
Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du mardi 4 juillet 1995
N° de pourvoi: 93-16198

Tout est dit... Cartier ne fait pas de quartier, mais ne manque surtout pas d'air !

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« Je persiste et je signe ! »

Docteur en droit, Université Paris-1 Panthéon-Sorbonne.

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Merci pour vos réponses.
Alors, après avoir mieux examiné le problème, il me semble qu'il y aurait une cause inexistante pour le vendeur. Dans le cas des erreurs d’étiquetage, en principe le vendeur a obligation de vendre au prix affiché. SAUF en cas d'énorme différence avec le vrai prix, où le vendeur peut demander la nullité de la vente. Dans un tel cas on peut considérer qu'il n'y a même pas offre. Comme la cause fait défaut, il peut y avoir nullité du contrat. Quand je parlais de prix réel, Yn, je voulais dire le prix auquel le vendeur comptait vendre, et non celui affiché. L'exemple que tu as pris me paraît bien parlant, mais le problème dans mon cas est que la différence de prix est beaucoup plus imposante... (des milliers d'euros) Donc là ce n'est même plus une erreur sur la valeur (et de toute façon, dans ce cas ça n'est pas une erreur retenue comme vice du consentement), mais un défaut de cause. Le vendeur n'avait pas d'intérêt à conclure le contrat.
En ce qui concerne cet arrêt (joli jeu de mot d'ailleur, Yn), effectivement, la Cour refuse cet argument d'absence de cause car elle ne considère pas le prix comme étant dérisoire. Sauf que quand même, les deux parties s'étaient accordées sur le prix, en ont discuté, il aurait été normal que le vendeur se rende compte qu'il vendait à un prix largement inférieur... Dans mon cas c'était une simple erreur d'étiquetage il n'y avait pas eu de discussion. Le prix n'est pas sérieux comparé au prix réel. Sauf que j'ai l'impression que le seul critère qui importe est le fait que le prix soit vil ou non, cela reviendrait à l'appréciation des juges du fond, et l'absence de cause ne compte pas. L'arrêt cité par marianne76 me semble un peu contestable pour cette raison car malgré tout le contrat n'était définitivement pas équilibré pour l'une des parties.

Mon dieu, j'ai l'impression de compliquer quelque chose supposé être simple.

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marianne76 Modérateur

Bonjour,
L'arrêt vous semble peut être contestable, mais il existe bel est bien et c'est de plus un arrêt publié au bulletin.
Dans la mesure où les juges du fond apprécient souverainement l'existence ou non d'un prix dérisoire, c'est somme toute une appréciation qui est forcément subjective et peut amener à des solutions auxquelles on n'adhère pas forcément, voir par ex
Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 12 juin 1996
N° de pourvoi: 94-16988 (arrêt également publié)
Il s'agissait d'une vente viagère la valeur vénale de l'immeuble fixée dans le contrat était de 220 000 f alors que sa valeur réelle était du double , alors certes le prix était insuffisant mais de là à dire qu'il était dérisoire ....

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Oui c'est pas faux... Merci beaucoup en tous cas