Retroactivité de la loi

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hi
je suis etudiante en premiere annee de droit et j'ai une explication a faire sur cet arret :


Citation:
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Vu l'article 706-14 du Code de procédure pénale dans sa rédaction issue de l'article 118 de la loi du 15 juin 2000 ;

Attendu que toute loi nouvelle s'applique immédiatement aux effets à venir des situations juridiques non contractuelles en cours au moment où elle entre en vigueur, même lorsque semblable situation fait l'objet d'une instance judiciaire ;

Attendu, que pour débouter M. X..., victime d'une atteinte à sa personne ayant entraîné une incapacité totale de travail d'une durée inférieure à un mois, de sa demande d'indemnisation présentée le 3 février 1998 devant une commission d'indemnisation des victimes d'infraction, l'arrêt infirmatif attaqué rendu le 23 juin 2000 se borne à retenir que le requérant ne justifie pas se trouver du fait de l'infraction dans une situation matérielle grave ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'article 118 de la loi du 15 juin 2000 alors entré en vigueur avait ouvert le droit à l'indemnisation prévue par l'article 706-14 du Code de procédure pénale aux personnes se trouvant du fait de leur préjudice dans une situation psychologique grave, la cour d'appel a violé l'article susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 juin 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;

remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;

Dit que sur les diligences du Procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept mai deux mille trois.



on nous a appris en cours que la loi n'était pas retroactive mais ici la cour de cassation dit le contaire a ce que j'ai compris. pouvez vous m'éclairer svp ? merci

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Poussepain Membre VIP

Bonjour,

Mais êtes vous sur que la loi n'est jamais rétroactive?

N'y a t'il pas des exceptions en matière pénale? Et en matière civile?

Je vous conseil de faire quelques recherches dans des manuels de droit pénal voir d'introduction au droit.

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"En droit, comme en tout, les connaissances ne sont rien, sans curiosité, intelligence, réflexion et imagination." Jean Louis Bergel

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Camille Intervenant

Bonsoir,
on nous a appris en cours que la loi n'était pas retroactive mais ici la cour de cassation dit le contaire a ce que j'ai compris. pouvez vous m'éclairer svp ?

Mais, il me semble que la Cour de cassation vous donne la clé de l'énigme. En haut là-haut tout là-haut dans le chapeau …

Donc, pas réellement d'effet rétroactif ici…
J'avoue qu'elle n'est pas facile à voir, mais lisez très attentivement l'article en question.

Si vous êtes en L1, je trouve que votre chargé de TD vous a posé un beau piège et ce n'est pas vous rendre service à ce niveau d'études, selon moi.

Relisez très attentivement l'article en question, "décortiquez-le", puis le chapeau de l'arrêt.

Il s'agit, bien entendu, du début de l'article qui est intéressant :

Article 706-14

Toute personne qui, victime d'un vol, d'une escroquerie, d'un abus de confiance, d'une extorsion de fonds ou d'une destruction, d'une dégradation ou d'une détérioration d'un bien lui appartenant, ne peut obtenir à un titre quelconque une réparation ou une indemnisation effective et suffisante de son préjudice, et se trouve de ce fait dans une situation matérielle ou psychologique grave, peut obtenir une indemnité dans les conditions prévues par patati, patata, bla bla bla…


Et essayez de découvrir "l'effet à venir" dont parle la Cour de cassation dans l'attendu de principe.

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Camille Intervenant

Bonsoir,
Mais êtes vous sur que la loi n'est jamais rétroactive?

N'y a t'il pas des exceptions en matière pénale? Et en matière civile?

Disons qu'il vaut toujours mieux commencer par voir si ce n'est pas une exception qu'en apparence.
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bonjour merci de vos reponses 36.gif

en relisant l'arret je me suis arreté sur ca :
"Attendu que toute loi nouvelle s'applique immédiatement aux effets à venir des situations juridiques non contractuelles en cours au moment où elle entre en vigueur, même lorsque semblable situation fait l'objet d'une instance judiciaire."

cela veut-il dire que comme il n'y avait pas de contrat la loi peut s'appliquer? c'est dc pas une exeption mais une regle general ?

je pense que c'est ca mais je n'arrive pas a bien le formuler...

mais justement le piege comme tu le mentionne, c'est que je dois mettre un lien entre la solution de la cour de cassation et l'article 2 :
« la loi ne dispose que pour l'avenir; elle n'a point d'effet rétroactif »

comment expliquer cela? l'article 2 dit que la loi ne peut pas etre retroactif (elle ne parle pas de contrat etc..)

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Camille Intervenant

Bonjour,
Non non, mais vous y êtes presque (selon moi, hein !).
Relisez très attentivement l'article que la cour d'appel a violé...
De quel fait exact parle cet article ?
Fait, qui serait postérieur à l'entrée en vigueur de la nouvelle mouture de cet article et dans une circonstance bien précise ? Une "situation juridique non contractuelle" ?
Et sachant que... la cour d'appel n'avait pas trouvé non plus ! Donc si vous y arrivez...

Et attention, c'est un article du code de procédure pénale.
Avant, libellé comme ci :
et se trouve de ce fait dans une situation matérielle grave

Maintenant libellé comme ça :
et se trouve de ce fait dans une situation matérielle ou psychologique grave


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Bonjour,
La cour de cassation dit que la cour d'appel a violé l'article Article 706-14 là où est mentionné que la victime peut recevoir une indemnisation si elle se trouve dans une situation materielle ou Psychologique grave ?

Ils ont oubliés la seconde partie à savoir la situation psychologique ?

Pouvez vous m'éclairer pour l'article du code civil qui évoque la retroactivité ? Car je dois le mettre en relation avec la solution de la cour de cassation. puis-je dire que l'article 2 ne s'applique que lors qu'un contrat est présent ?

est-ce qu'on peut dire que le probleme ici est l'application d'une loi à un probleme posterieur à sa creation ?

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Camille Intervenant

Re,
Vous tournez autour, là.
Pour moi, le problème est effectivement postérieur, non pas à la création, mais à la modification de la loi, donc la modification de cet article, qui inclut justement ce que la cour d'appel a oublié (ou a refusé d'appliquer).
Donc la loi sur la rétroactivité, qui est en fait et tout bêtement l'article 2 du code civil, a bien été respecté(e), toujours selon moi.
Dans cette histoire, il y avait deux affaires en une.
Une première contre le responsable, mais elle n'a pas réussi à obtenir réparation et la deuxième, la demande d'indemnisation prévue à l'article 706-14.

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Merci de votre réponse.
Donc nous pouvons dire que le problème serait de savoir si une modification de la loi peut être retenu à un cas postérieur à cette modification ?

en fait ce qui me bloque c'est schématiquement ca :
M.X fait sa demande en 1998.
En cette année, la loi n'était pas encore modifié donc il devrait pas obtenir une indemnisation non ?
Le 15 juin, la loi a été modifié, le 20 la cour d'appel refuse et ignore la loi du 15 juin. Je sais que la cour de cassation dit "Attendu que toute loi nouvelle s'applique immédiatement aux effets à venir des situations juridiques non contractuelles en cours au moment où elle entre en vigueur, même lorsque semblable situation fait l'objet d'une instance judiciaire ;" Mais quand est-il de l'article 2 alors qui ne prévoit que l'avenir ?

C'est le terme avenir qui est ambigu non ?

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Camille Intervenant

Re,
nous pouvons dire que le problème serait de savoir si une modification de la loi peut être retenu à un cas postérieur à cette modification ?

Euh non, là, la question ne se poserait même pas, dit comme ça. Cas postérieur à la modification de la loi, la loi s'applique.


en fait ce qui me bloque c'est schématiquement ca :
M.X fait sa demande en 1998.
En cette année, la loi n'était pas encore modifié donc il devrait pas obtenir une indemnisation non ?
(…)
C'est le terme avenir qui est ambigu non ?

Oui, il y a de ça, mais à mon humble avis, la Cour de cassation ne considère pas - à juste titre - que le fait générateur est la demande proprement dite, donc la date ou Mme X… dépose sa demande.
Le fait générateur, c'est "se trouve de ce fait dans une situation matérielle ou psychologique grave"…
Or, ce fait-là n'est pas instantané, il perdure… jusqu'à indemnisation… ou rejet définitif (ou forclusion).

Supposons que Mme X… ait épuisé tous ses recours sans succès le 1er février 1998.
Ce jour-là, elle remplit bien les conditions "Toute personne qui, victime d'un vol, d'une escroquerie, d'un abus de confiance, d'une extorsion de fonds ou d'une destruction, d'une dégradation ou d'une détérioration d'un bien lui appartenant, ne peut obtenir à un titre quelconque une réparation ou une indemnisation effective et suffisante de son préjudice".
Donc, dès ce jour-là, elle "se trouve de ce fait dans une situation matérielle ou psychologique grave" sans avoir obtenu la fameuse indemnité. Sauf que, à cette date, la situation matérielle grave est indemnisable, la situation psychologique n'est pas indemnisable.
Le 30 mars 1998, elle dépose une demande.
Ce jour-là, elle "se trouve [toujours] de ce fait dans une situation matérielle ou psychologique grave" sans avoir obtenu la fameuse une indemnité. Sauf que, à cette date, la situation matérielle grave est indemnisable, la situation psychologique n'est [toujours] pas indemnisable.
Supposons que la cour statue sur son cas le 14 juin 2000.
Ce jour-là, elle "se trouve [toujours] de ce fait dans une situation matérielle ou psychologique grave" sans avoir obtenu la fameuse une indemnité. Sauf que, à cette date, la situation matérielle grave est indemnisable, la situation psychologique n'est [toujours] pas indemnisable.

Mais, la cour n'a statué que le 20 juin 2000.
Ce jour-là, elle "se trouve [toujours] de ce fait dans une situation matérielle ou psychologique grave" sans avoir obtenu la fameuse une indemnité. Il se trouve que, à cette date, la situation matérielle grave est indemnisable, mais…
Supposons maintenant qu'elle n'ait déposé sa demande que seulement le 15 juin 2000 et que la cour statue le 20.
Ce jour-là, elle "se trouve [toujours] de ce fait dans une situation matérielle ou psychologique grave" sans avoir obtenu la fameuse une indemnité. Sauf que, à cette date, la situation matérielle grave est indemnisable, la situation psychologique est [devenue] indemnisable.
Elle aurait donc bien été indemnisée, alors que le fait réellement générateur remonte à la même date, le 1er février 1998 et alors que l'effet perdure depuis cette date jusqu'au 20 juin 2000. Sauf qu'au sens juridique du terme, un "effet nouveau", parce que "devenu indemnisable" est apparu le 15 juin.
Donc, deux situations rigoureusement identiques, mêmes causes, mêmes effets et aux mêmes dates, la seule différence étant la date de dépôt de la demande.

D'ailleurs, de ce point de vue, la cour ne s'y trompe pas. Le 20 juin, elle dit bien "le requérant ne justifie pas se trouver du fait de l'infraction dans une situation matérielle grave", sous-entendu "à ce jour du 20 juin 2000", sous-entendu "pas plus aujourd'hui qu'hier" et elle ne dit pas "le requérant ne justifie pas se trouver s'être trouvé du fait de l'infraction dans une situation matérielle grave à la date de sa demande d'indemnisation, soit le 30 mars 1998" encore moins "à la date d'épuisement de tous les recours, soit le 1er février 1998". Et, bien évidemment, ici, on ne discute pas de l'infraction elle-même, génératrice initiale de la ribambelle d'effets et de situations juridiques.


Si maintenant, on relit attentivement l'attendu de principe de la Cour…
Donc, j'aurais tendance à en déduire que c'est la bonne solution.
En principe, en droit civil, il n'y a pas d'exception à la non-rétroactivité.

Au fait, il faudrait peut-être aller jeter un coup d'œil au Titre XIV du CPP : Du recours en indemnité ouvert à certaines victimes de dommages résultant d'une infraction, donc à partir de l' article 706-3, parce qu'on y trouve des choses intéressantes, notamment :

Article 706-5
A peine de forclusion…
Toutefois, la commission relève le requérant de la forclusion lorsqu'il n'a pas été en mesure de faire valoir ses droits dans les délais requis ou lorsqu'il a subi une aggravation de son préjudice

Article 706-5-1
La demande d'indemnité…
Ces dispositions sont également applicables en cas d'aggravation du préjudice.


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Camille Intervenant

Bon… vous avez remarqué que nos petit(e)s camarades ne se bousculent pas au portillon, celui qui donne dans la cour, pour venir m'apporter la contradiction…

Remarquez, comme déjà dit, si vous vous plantez, vous ne serez pas la seule, la cour de Colmar s'est plantée aussi.
Et si c'est bon, vous pourrez postuler pour remplacer cet incapable de Président de la dite cour, qui n'a même pas su lire correctement des textes de lois et de codes finalement assez simples, non ?
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P.S. : j'ai vaguement l'impression que la cour d'appel de Metz n'a pas dû trop de réjouir de se voir échoir ce cas…
Pas trop sur la décision à prendre, mais pour la motiver sans oublier de répondre aux conclusions du fonds de garantie des victimes. Je plains également le Conseil de ce fonds.
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la loi n'est pas rétrocative (principe) sauf si elle le mentionne dans le texte

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Camille Intervenant

BONJOUR, BONJOUR, BONJOUR,
Merci de votre intéressante intervention, mais vous avez remarqué que ce n'était pas réellement la "question du jour" dans cette file et dans le cas proposé ?
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