Vente immobilière et clause suspensive

Publié par
Camille Intervenant

Bonjour,
Petit problème de "mécanique"...

Dans le cadre d'une vente immobilière avec condition suspensive pour obtention d'un prêt, le compromis de vente prévoit le versement d'un séquestre par l'acheteur, séquestre détenu par son propre notaire.
A l'issue du délai fixé par la condition suspensive, la banque n'a toujours pas pris sa décision sur la demande de prêt (banque qui finira, quelques jours plus tard, par refuser d'accorder ce prêt).

Dans le cadre de l'article L312-16 2e alinéa du code de la consommation, le notaire de l'acheteur est-il tenu de solliciter et d'obtenir l'accord du vendeur avant de libérer le séquestre ?

Merci d'avance pour vos réponses éclairées.


Dans le compromis, il est prévu que l'acheteur justifie au vendeur par un écrit de la banque de toute décision d'obtention ou de refus dans les 48 heures de la décision.
Cette clause est-elle légale en soi ?
Est-elle contractuellement valable alors qu'il est écrit dans le compromis que dès que la condition suspensive n'est pas réalisée dans le délai convenu, le compromis est considéré comme nul et non avenu ?




Considérant que ce délai n'a pas été respecté, le vendeur transmet un fax au notaire de l'acheteur où il manifeste son mécontentement et invoque ce délai non respecté pour l'informer qu'il a l'intention de se prévaloir d'une faute de l'acheteur pour considérer que la clause suspensive est réputée accomplie, en vertu du 1178 du code civil.
Le notaire de l'acheteur peut-il/doit-il tenir compte de cette seule information pour considérer qu'il y a litige et pour retenir le séquestre ?
Si l'acheteur veut porter l'affaire en justice pour se faire restituer le séquestre, doit-il viser son propre notaire ou le vendeur ?
Ou le notaire du vendeur si le fax a été émis par ce dernier ?



En résumé, le notaire de l'acheteur étant le détenteur réel du séquestre, est-il aussi le détenteur de droit de ce séquestre ou n'est-il que le détenteur pour le compte et sur ordre du vendeur, ne pouvant donc le libérer que sur son ordre ?
Dans ce cas, que veut dire exactement l'expression "toute somme versée d'avance par l'acquéreur à l'autre partie et pour le compte de cette dernière [le vendeur, donc] est immédiatement et intégralement remboursable sans retenue ni indemnité à quelque titre que ce soit" dans l'article L312-16 précité ?

Accessoirement, la position du vendeur est-elle justifiée ?

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A mon avis, purement théorique :

Il faut bien distinguer deux choses :
- on a un contrat de vente sous condition suspensive que l'acheteur obtienne un prêt.

- En outre l'acheteur s'est engagé à une obligation d'information du vendeur sur la réalisation (ou non) de la condition. Cette clause semble a priori légale, mais sa portée est limitée.

Le fait que l'acheteur n'ait pas respecté son obligation d'information est bien une faute, mais elle ne saurait remplir les conditions d'application de l'article 1178 du code civil. Cette faute oblige simplement l'acheteur à indemniser l'éventuel préjudice causé au vendeur par le fait de l'avoir informé en retard/pas informé de la non obtention du prêt.

Le contrat est donc nul par non réalisation de la condition suspensive, indépendamment du manquement de l'acheteur à son obligation d'information.

Ensuite si une somme a été versée par l'acheteur sur un séquestre, alors elle n'a pas été versée au vendeur, donc je ne vois pas en quoi l'article L312-16 2ème alinéa du code de la conso serait applicable.

A moins qu'il n'en soit disposé autrement, le vendeur est tiers à la convention par laquelle l'acheteur a confié une somme d'argent à son notaire, donc je vois pas pourquoi y aurait besoin de l'accord du vendeur, et c'est bien contre le notaire qu'il faudrait intenter une action en cas de refus de restituer la somme.

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Camille Intervenant

Bonjour,
Un grand merci pour cette première réponse qui rejoint à peu près mes propres conclusions.

Donc, pour préciser…

1°) Pour le séquestre, cette clause figure dans le compromis de vente, qui précise qu'il est "choisi par les parties d'un commun accord", et est indéniablement une clause à la demande du vendeur (je passe sous silence certaines incohérences dans la rédaction du compromis réel dans lequel, dans un paragraphe IX, on y parle d'un somme en séquestre, sans dire clairement sa destination, puis, dans un paragraphe X sur les conditions suspensives, on y parle de "somme remise au titre d'acompte", sachant qu'aucun autre paragraphe du compromis ne traite d'un éventuel acompte…).
Il est d'ailleurs écrit un peu plus loin, dans l'éventualité d'une faute commise par l'acquéreur, que le séquestre ne pourra se dessaisir des fonds que d'un commun accord entre les parties ou en vertu d'une décision de justice.
C'est d'ailleurs un peu là-dessus que s'appuie le notaire. Mais, dans ce cas, à supposer que le vendeur soit partie indirecte à cette convention, le L312-16 aurait bien vocation à s'appliquer.

2°) L'acheteur n'a rien retardé : à la date limite de la condition suspensive, il n'avait ni l'information du refus de la banque ni l'information d'un accord de la banque. Le délai de 48h était le délai de remise d'un justificatif de la banque au vendeur une fois la décision d'accord ou de refus exprimée, je suppose verbalement, par la banque (j'ai d'ailleurs simplifié le cas réel, assez confus, pour ne discuter que sur les principes généraux).

Ce qui m'amène à une question "auxiliaire" :

Lorsqu'une banque vous signifie verbalement qu'elle accepte votre demande de prêt, à fortiori quand elle la refuse, vous êtes capable, vous, de la forcer à vous remettre une attestation dans les 24 heures ?
Puisqu'il faudra encore compter au moins 24 heures pour l'acheminer au vendeur ?
On ferait donc porter sur l'acheteur une obligation de réalisation dont il n'est pas maître, la banque n'ayant elle-même aucune obligation légale à son égard, que je sache.
Et, en fait, ce n'est pas la seule obligation de cette nature que je constate quand je lis certains commentaires sur tout ce sujet, sur des sites pourtant catalogués comme sérieux : l'acheteur se retrouverait "pieds et poings liés" au bon vouloir d'un organisme de prêt, qui lui-même n'a aucune obligation, sous peine d'être considéré comme fautif dans la non réalisation de la condition suspensive.
Quelque chose m'échappe dans tout ce mécanisme, d'autant que l'acheteur est souvent un particulier face à des professionnels : l'agence immobilière qui fait signer le compromis, la banque qui reçoit la demande.


Une chose est certaine, le prêt n'ayant pas été accordé à la date limite, les effets du compromis s'arrêtent contractuellement à cette date (c'est d'ailleurs bien rappelé dans le compromis de vente : "les présentes seront considérées comme nulles et non avenues"). Donc, je vois mal comment l'une des parties, ici le vendeur, peut se prévaloir contractuellement de clauses du compromis uniquement applicables postérieurement, donc qui ne s'exerceraient, par définition, que passé cette date, dans l'hypothèse ou le prêt n'a été ni refusé ni accordé à cette date.

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