Carrefour, Leclerc et consorts: Clauses abusives.

Publié par

Bonjour à tous,

Cela fait deux jours que l'on me serine les oreilles avec le procès intenté aux sociétés de grandes distributions. Les journalistes se réfèrent à la notion de clause abusive, et d'équilibre contractuel. On fait appel à la DGCCRF, Bref.

Ce qui me chagrine, c'est que la notion de clause abusive et d'équilibre ne vise que les contrats conclus entre un professionnel et un consommateur. Or, les fournisseurs n'étant pas des consommateurs, comment peut-on appliquer une notion de Droit de la consommation?

Quelles sont les textes permettant d'encadrer la liberté contractuelle des supermarchés?


Merci à tous!

__________________________
Doctorat en Droit privé et Sciences criminelles à faculté de droit de montpellier

Publié par
Camille Intervenant

Bonjour,
Vous faites bien de soulever ce problème.
Je ne sais pas trop pourquoi une forme de "Légende Urbaine" est en train de se développer, rien qu'à regarder sur Internet.
Sous prétexte que des textes précis, lois, articles de code, et., ont été pondus expressément pour défendre spécialement les consommateurs contre des clauses abusives de certains professionnels, alors la notion de "clause abusive" serait exclusivement réservée au bénéfice des non professionnels.
Bien sûr que si, le droit des contrats permet d'invoquer une clause abusive au bénéfice d'un professionnel, heureusement d'ailleurs, mais ce ne seront pas forcément les mêmes que celles au bénéfice d'un consommateur et donc pas en vertu du code de la conso.
La seule différence, en gros et [u:1pqbapfa]pour simplifier[/u:1pqbapfa], c'est qu'un vendeur/acheteur professionnel est considéré comme un "adulte responsable et compétent, sachant ce qu'il fait et censé savoir à quoi il s'engage quand il signe un contrat", alors qu'un consommateur sera considéré, par défaut, comme un "crétin congénital qui ne comprend rien à rien et qui sait à peine lire et écrire" (en exagérant un peu :D ). Donc, on n'a pas crû bon pondre des textes spécifiques à destination des professionnels ( * ).
Donc la notion de "abusive" ne sera pas du même niveau...

Vous noterez d'ailleurs au passage qu'ici, on parle de "clause abusive" de la part de l'acheteur et non pas du vendeur.
Donc dans le sens "inverse", en quelque sorte, de celui auquel vous faites allusion.

( * ) Il y a néanmoins, dans la récente loi dite "LME" quelques éléments de pistes, transcrits dans le code de commerce. :wink:

__________________________
Hors Concours

Publié par

Merci beaucoup Camille pour ta réponse,

Tu as raison, c'est certain, sinon il n'y aurait pas de procès..

Sauf que..

Les clauses abusives du Code de la consommation ont été crées par l'article L132-1 dudit Code qui dispose que:

Citation :

Dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.



Or, les professionnels n'étant pas soumis au Code de la consommation, on en reste à la lettre de l'article 1134 du Code civil qui prévoit quant à lui que:
Citation :

"les conventions légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites".



Dès lors, si on admet que la notion de clause abusive puisse existe entre un vendeur professionnel et un acquéreur professionnel, je veux que l'on me montre du doigt, l'article ou le principe général du Droit, qui prévoirait expressément que la liberté contractuelle des professionnels n'est pas totale..

Je sais que la notion de Clause léonine quelle que peu semblable, avait été créée en Droit des sociétés pour limiter les clauses "abusives" (même si le terme ne peut s'employer ici) mais dans le cadre du droit commercial pur et dur, je ne vois pas..

EDIT: J'ai trouvé la loi LME que tu as mentionné et j'ai eu la réponse à ma question...


Merci!

__________________________
Doctorat en Droit privé et Sciences criminelles à faculté de droit de montpellier

Publié par
Camille Intervenant

Bonjour,

Citation de Gab2 :


Les clauses abusives du Code de la consommation ont été crées par l'article L132-1 dudit Code qui dispose que...

Non, non, ce n'est pas du tout l'article "fondateur" des clauses abusives. C'est simplement l'article qui définit ce que sont des clauses abusives dans le cadre d'un contrat avec un consommateur (un "non professionnel"), mais ça ne veut pas dire du tout qu'il ne pourrait pas exister des clauses abusives dans un contrat entre deux professionnels. Mais, dans un contrat entre professionnels, on pourra admettre un "déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat", donc même significatif. Pour un professionnel, il sera beaucoup plus difficile de démontrer qu'une clause est abusive, notamment, il n'aura pas l'appui d'une liste plus ou moins exhaustive et d'un texte "étudié pour", comme disait Fernand Raynaud.

Citation de Gab2 :


Les clauses abusives du Code de la consommation ont été crées par l'article L132-1 dudit Code qui dispose que...
...
Or, les professionnels n'étant pas soumis au Code de la consommation, on en reste à la lettre de l'article 1134 du Code civil qui prévoit quant à lui que...

Dès lors, si on admet que la notion de clause abusive puisse existe entre un vendeur professionnel et un acquéreur professionnel, je veux que l'on me montre du doigt, l'article ou le principe général du Droit, qui prévoirait expressément que la liberté contractuelle des professionnels n'est pas totale..

Ne serait-ce que (en vrac et à titre d'exemples)...
Citation de Code civil :


Article 1106
Le contrat à titre onéreux est celui qui assujettit [u:wxygg6kw]chacune des parties[/u:wxygg6kw] à donner ou à faire quelque
chose.

Article 1709
Le louage des choses est un contrat par lequel l'une des parties s'oblige à faire jouir l'autre d'une
chose pendant un certain temps, et moyennant un certain prix que celle-ci s'oblige de lui payer.

Article 1710
Le louage d'ouvrage est un contrat par lequel l'une des parties s'engage à faire quelque chose pour
l'autre, moyennant un prix convenu entre elles.
Citation :


Un contrat/clause entre professionnels sans aucune contrepartie de la part d'une des parties pourra être considéré comme illégal/abusif. La charge de la preuve par le plaignant sera plus complexe si c'est un professionnel face à un autre professionnel.
Le fait, par exemple, de prévoir la reprise des invendus par le fournisseur pourra (mais pourra seulement) être une clause considérée comme abusive ; comme elle pourra ne pas l'être ou comme elle pourra l'être pour un contrat donné mais pas forcément pour un autre. Donc, à mon humble avis, quand bien même une société Tartempion obtiendrait gain de cause face à Fourrecar ou Leclaire après avoir "épluché" le contrat visé, ça ne ferait pas forcément jurisprudence, en tout cas pas "jurisprudence générale" pour tous les autres. Parce que un "certain déséquilibre", voire un "déséquilibre certain" restera admis entre professionnels.

Citation de Gab2 :


EDIT: J'ai trouvé la loi LME que tu as mentionné et j'ai eu la réponse à ma question...

Qui ne fait que préciser les contours d'une notion pré-existante, même entre professionnels.

__________________________
Hors Concours