bonjour,
après plusieurs recherches infructueuses, je viens chercher un peu d'aide ici,
concernant les marchés publics, on sait que les prérogatives accordées à la puissance publique (ex : droit unilatérale de résiliation) sont corrélées par des obligations justifiées par la recherche de l'intérêt général (ex : procédure d'appel d'offre).
je me demandais si dans la constitution française, préambule, DDHC 1789... il y avait une référence à cet intérêt général.
pour le moment, je n'ai rien, j'en conclue donc que c'est la jurisprudence qui a consacré ce principe d'intérêt général (notamment la jurisprudence de l'ordre administratif).
est-ce que quelqu'un peut confirmer qu'effectivement, pas d'intérêt général dans la constitution, ou m'orienter vers la source de droit que je n'aurai pas trouvée ?
éventuellement les articles 13-14 de la DDHC "Art. 13. Pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés.
Art. 14. Tous les Citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi, et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée."
mais c'est réducteur, puisque c'est la force publique qui est concernée.
merci de votre attention.
cdlt
Bonjour Rachdu,
Concernant les marchés publics en particulier et plus largement les contrats administratifs (je crois que c'est la matière qui vous occupe), en effet, il vous faut chercher du côté doctrinal et jurisprudentiel.
La théorie du contrat administratif (qui tente de fonder les pouvoirs exorbitants reconnus à l'administration contractante) a été en premier lieu établie par Gaston Jèze et reprise un peu plus tard Péquignot. Il existait bien avant leur réflexion des contrats passés par l'administration, mais ce sont eux qui ont fait un effort de théorisation à leur propos notamment en dégageant des points communs à ces contrats et en effet, les pouvoirs exorbitants de l'administration lui sont dévolus au nom de l'intérêt général qu'elle poursuit.
Cette théorie a été entérinée par la jurisprudence en 1958 (le fameux arrêt du conseil d'Etat "Distillerie de Magnac-Laval")
Pour ce qui est de l'intérêt général, là encore cela renvoie à des conceptions doctrinales qui sont anciennes et divergentes :
• Conception utilitariste de l’IG :
L’IG est ici la somme des intérêts particuliers c'est-à-dire qu’il n’est pas distinct des intérêts privés. il n’y a pas de domination de l'un sur les autres : en laissant chacun se satisfaire de lui-même, on est finalement satisfait de tous. On retrouve cette conception en droit de l'Union(idée que l’IG de l’Union reste celui des Etats membres qui viennent chercher ce dont ils ont besoin).
• Conception de l’IG comme intérêt commun :
Qui dit commun dit conciliation, consensus sur des choses en commun, sur des intérêts qui convergent (fortement marqué par l’Eglise) chacun doit abandonner un peu de son intérêt pour que l’essentiel soit conservé. Chacun trouve à l’étage au dessus un peu de son intérêt, conception par étage ou par corporation, à l’arrivée, l’intérêt commun ne recoupe que partiellement les intérêts particuliers (On peut citer Saint-Thomas d’Aquin) cela sert aussi les bases canoniques du droit administratif
• La 3ème conception : la transcendance de l’IG
La conception qui est celle française (à l'heure actuelle les choses évoluent), c'est considérer qu’il y a transcendance de l’IG : il est présenté par les auteurs comme l’intérêt propre de la collectivité qui transcende les intérêts particuliers des membres de cette collectivité. On crée ainsi une instance qui est l’Etat et qui dit ce qu'est l’IG celui-ci étant totalement coupé des intérêts particuliers. La sphère publique est ainsi totalement coupée de celle privée.On est sur le modèle de Saint Augustin
Bref tout cela pour vous dire que l'intérêt général n'est pas un principe mais plutôt un concept ancien qui diverge en fonction des époques et des pays. L'intérêt général renvoie à des conceptions d'ordre politique, son contenu est donc à géométrie variable.
Et pour répondre à votre question, je pense que la source est tant doctrinale que prétorienne (in fine c'est le juge qui décide de ce qu'est l'intérêt général)
Je vous renvoie :
- d'une part à un jugement du tribunal des conflits tout à fait récent qui concerne les contrats administratifs et qui réaffirme cet intérêt général in fine fixé par le juge : TC, 13 oct 2014 Société Axa France Iard/Maif : « Le contrat litigieux ne comporte aucune clause qui, notamment par les prérogatives reconnues à la personne publique contractante dans l’exécution du contrat, implique, dans l’IG, qu’il relève du régime exorbitant des contrats administratifs »
- Au rapport public du Conseil d'Etat "Réflexions sur l'intérêt général" de 1999
Désolée de la longueur de mon message j'espère que cela pourra vous aider.
"Bref tout cela pour vous dire que l'intérêt général n'est pas un principe mais plutôt un concept ancien qui diverge en fonction des époques et des pays."
très intéressant...
"Désolée de la longueur de mon message j'espère que cela pourra vous aider."
il ne faut pas, c'est très gentil d'avoir développé et merci pour les sources.